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René Verney un médecin normand dans la grande guerre (43e RAC, 74e et 24e RI)
11 novembre 2016

Retranscription des lettres du sous-lieutenant Maurice Alliot, 43e RA

 

 

 

 

LES LETTRES DU SOUS-LIEUTENANT MAURICE ALLIOT

 

43e régiment d’artillerie, 21e batterie

 

30 juillet 1914 – 22 mars 1915

(conservées aux archives départementales du Calvados cote 1J/42/9)

 

 

 

 

 

 

RETRANSCRIPTION

 

 

Sont ici retranscrites les 23 correspondances entretenues par Maurice Alliot (Saint-Denis 1889 - Fontenay-les-Briis 1990), sous-lieutenant de réserve au 43e régiment d’artillerie, avec ses parents durant les premiers mois du conflit.

 

Pour leur mise en contexte général, nous renvoyons à l’introduction consacrée à la présentation de ce lot inédit conservé aux archives départementales du Calvados (cote 1J/42/9). Celle-ci en précise la nature et l’esprit qui évolue en fonction des phases du conflit, s’associant tant à sa situation militaire qu’au cadre social dont il est issu et dont nous avons tenté de brosser les portraits.

 

Les courriers sont ici présentés de manière chronologique et regroupés en fonction des différentes phases d’engagement de son unité, la 21e batterie du 43e régiment d’artillerie (43e RA) au cours des sept premiers mois du conflit :

 

I/ MOBILISATION A CAEN (CALVADOS) ET VERSAILLES (YVELINES), 30/07 - 10/08/1914

 

II / EN POSITION DE RESERVE A LAIGNY (AISNE), 11-20/08/1914

 

III / A LA RENCONTRE DE L’ENNEMI, 21-24/08/1914

 

IV / LA RETRAITE, 25/08 - 05/09/1914

 

V / BATAILLE DE LA MARNE, 06 - 13/09/1914

 

VI / SECTEUR DE BERRY-AU-BAC (AISNE), 13/09 – 04/10/1914

 

VII / SECTEUR DE MARICOURT ET SUZANNE (SOMME), 01/10/1914 – 27/04/1915

 

VIII / FRAGMENT NON DATE, NON SITUE

 

 

Les retranscriptions sont précédées d’une courte présentation du parcours du groupe de renforcement du 43e RA auquel appartient l'unité, lui-même élément de l’artillerie divisionnaire de la 53e Division d’infanterie de réserve (ou AD 53). Ces quelques lignes enrichies d’une cartographie spécialement réalisée ont pour objectif d’approcher le plus précisément possible, le contexte dans lequel les lettres ont été rédigées.

 

Les noms ou occurrences renvoyant à une personne sont restitués en gras afin d’inviter à consulter l’Index des noms de personnes auquel nous renvoyons pour toute identification et documentation.

 

Pour l’enrichissement des faits militaires, nous renvoyons à trois sources documentaires principales :

 

Le Journal des marches et opérations de l’artillerie de la 53e division d’infanterie de réserve (Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées 26 N 366/7 du 02/08/1914 au 31/03/1915 et 26 N 366/8 du 01/04 au 31/12/1915 [cf. JMO AD53].

 

Le Journal des marches et opérations du 1er groupe d’artillerie de la 53e Division de réserve, groupe de renforcement du 43e régiment d’artillerie (Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées 26 N 980/12  du 02/08 – 16/12/1914 et 26 N 980/13 du 17/12/1914 au 27/04/1915).

 

Journal du capitaine Girard : Anonyme - Sur le front occidental avec la 53e Division d’infanterie. I Août 1914 à Mai 1915 La guerre de mouvement. En secteur à Suzanne. Paris, Berger-Levrault ed. 1932. I

 

 

A la fin de chaque introduction sont offertes un accès aux pages correspondant à la période concernée.

 

 

 

 

I/ Mobilisation à Caen (Calvados) et Versailles (Yvelines), 30/07-10/08/1914

 

 

 

Deux courtes lettres correspondent à la phase qui précède le départ de l’unité dans laquelle est affecté Maurice Alliot.

 

Le premier courrier est rédigé depuis Caen, deux jours avant la mobilisation. Maurice Alliot engagé volontaire pour cinq ans en 1910 au titre de l’Ecole centrale, est en effet affecté depuis le 01/10/1913 avec le grade de sous-lieutenant de réserve, au 43e RAC, 3e groupe, 8e batterie. Le dépôt régimentaire est le quartier d’artillerie Claude Decaen à Caen (voir : Le 43e RAC : de Rouen à Caen 1911-1940).

 

Au plus tard le 30 juillet 1914, il est versé à la 21e batterie qui se constitue à Versailles, en parallèle des 22e et 23e batteries, pour former le 1er groupe de renforcement du 43e Régiment d’artillerie qui se rassemble Rue Neuve. Il fait ainsi partie de l’effectif des officiers du groupe de renforcement à la date du 10/08/1914 JMO 1er groupe de renforcement du 43e RA ; JMO AD53).

 

Le second courrier est ainsi rédigé depuis Versailles la veille du départ de l’unité composée de 3 officiers, 17 sous-officiers, 173 hommes, 186 chevaux et 18 voitures hippomobiles attelant 12 canons de 75mm et leurs caissons qui renferment 1248 obus soit 8,736 tonnes de munitions.

 

La 21e batterie placée sous le commandement du lieutenant d’active Jacques Etienne Marie Joseph de Lamarzelle (1885-1939), embarque avec l’Etat-major du groupe placé sous les ordres du chef d’escadron Adrien Moïse Mendès-Bonito (Bordeaux 1868 - Le Vésinet 1930), à la gare de Saint-Germain Grande ceinture, le départ ayant lieu le 11 août 1914 à 11h51.

 

 

Documents connexes :

 

Journal des marches et opérations de l’artillerie de la 53e division d’infanterie de réserve (Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées 26 N 366/7) [JMO AD53].

 

Journal des marches et opérations du 1er groupe d’artillerie de la 53e Division de réserve, groupe de renforcement du 43e régiment d’artillerie (Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées 26 N 980/12).

 

Journal du capitaine Girard : Anonyme - Sur le front occidental avec la 53e Division d’infanterie. I Août 1914 à Mai 1915 La guerre de mouvement. En secteur à Suzanne. Paris, Berger-Levrault ed. 1932. I, Mobilisation, pp. 2-9.

 

 

 

Correspondance n°1

 

 

Caen, 30 juillet 1914

Mes chers parents,

Je vous remercie des nouvelles fréquentes que vous m’envoyez.

J’en suis très heureux, surtout à ce moment.

Je vous écrirai tous les jours, faites de même.

La situation ne semble pas aggravée ici aujourd’hui, malgré cela nous continuons nos préparatifs.

Peu à peu, j’arrive aussi à améliorer mon équipement personnel.

En cas de guerre voici une liste d’officiers qui seront avec moi :

Cap. de Larminat

Lt de Lamarzelle             

S/lt Hurel

Adjt Salles

du 43e Regt d’artillerie

[Dans la marge] Lieutenant Parmentier 1907 / Lieutenant Ragaine

A Versailles, outre les rues de Beaumont et des Missionnaires, nous aurons à faire dans les Avenues Jeanne d’Arc, Bd Central, Place Dorency et vous pourriez avoir quelques renseignements 20 rue Neuve.

Voici l’adresse qui serait la mienne :

Correspondance militaire

Maurice Alliot

Sous-lieutenant

43e Rgt d’Art.                  

21e batterie                      

Par le dépôt de Versailles (je crois)

En tous cas, il y aura dans les bureaux de poste et les mairies des carnets donnant les renseignements voulus.

Robert Bouché n’est certainement plus à Mailly.

Excusez-moi de terminer ici ma lettre, mais il est tard déjà et il faut que j’aille dîner. Je vous embrasse bien affectueusement tous quatre.

M. Alliot

 

 

Correspondance n°2

 

Versailles, 10 août

Fatigue, énervement mais prêt à partir. Les chevaux vont bien.

Je vous embrasse bien affectueusement.

M. Alliot

 

 

 

 

II / En position de réserve à Laigny (Aisne), 11 - 20/08/1914

 

 

Après un trajet en train de 200 km parcourus en un peu moins de 11h, le groupe débarque à Marle (Aisne). Le soir du 11 août, après un trajet par route de 18 km, il cantonne à Laigny (Aisne) où il stationne jusqu’au 21 août.

 

 

Deux lettres de Maurice Alliot datées des 14 et 17 août 1914 sont rédigées durant ces 9 jours où le groupe, placé en position de réserve, participe à la mise en défense de la vallée du Ton au nord-est de Vervins (JMO AD53). Les positions des 21e et 23e batteries sont aménagées cote 214 à 500m à l’est de la rue des Carettes, aux limites de Fontaine-lès-Vervins et de La Bouteille, les pièces y sont progressivement abritées sous casemate.

 

Les courriers sont probablement rédigés depuis le cantonnement organisé dans les bois de Laigny, où Maurice Alliot reçoit pour la première fois des informations sur la situation militaire qui émanent du Bulletin des armées de la République, dont le premier numéro est daté du samedi 15 août 1914.

 

Sans avoir pris part à aucun combat, l’unité quitte ses positions le 21 août et accompagne le mouvement de la 53e DI qui gagne la frontière Belge dans la région de Maubeuge. Est alors déjà engagée la bataille de Charleroi dans laquelle sont par ailleurs impliqués les trois groupe du 43e régiment d’artillerie composant le 43e RAC (voir : Restitution du journal de marche de René Verney I et Restitution du journal illustré d’André Roussel).

 

 

Documentation connexe voir :

 

Journal des marches et opérations du 1er groupe d’artillerie de la 53e Division de réserve, groupe de renforcement du 43e régiment d’artillerie (Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées 26 N 980/12).

 

Journal du capitaine Girard : Anonyme - Sur le front occidental avec la 53e Division d’infanterie. I Août 1914 à Mai 1915 La guerre de mouvement. En secteur à Suzanne. Paris, Berger-Levrault ed. 1932. Tome I, chapitre II En réserve à Laigny, pp. 10-17.

 

 

 

Correspondance n°3 [Laigny (Aisne)]

 

14 août 1914

Ma chère maman

C‘est demain ta fête et je ne puis te la souhaiter, je n’ai même pas l’espoir que tu recevras ma lettre, car elles ont toutes un retard de 6 ou 6 jours, donné systématiquement par la poste. Cependant je pense à toi et fais mes meilleurs vœux pour cet anniversaire.

Nous sommes toujours en période de mise au point des réserves et espérons partir bientôt plus avant.

Je ne puis t’en dire plus par crainte de voir ma lettre détruite. Nos cantonnements sont bons et agréables par le beau temps. Il y a des bois et de l’eau : de l’ombre et de la fraîcheur. Nous avons eu très chaud avant-hier et hier.

J’ai rencontré quelques camarades de promotion des fils Limasset, ceci fait des relations plus agréables. Les rapports sont d’ailleurs bons entre les officiers et on tire le meilleur parti de la situation présente. Malheureusement le pays s’appauvrit et on ne trouve plus rien, ni denrées, ni menus objets.

Il nous est pénible aussi d’être sans nouvelles de ce qui se passe. Enfin, les jours s’écouleront et la situation s’éclaircira.

Embrasse bien Thérèse et papa pour moi, rappelle-moi au souvenir des Rol et de M. Limasset.

Je t’embrasse bien affectueusement,

Maurice

 

 

 

Correspondance n°4 [Laigny (Aisne)]

 

 

17 août 1914

Mes chers parents, ma chère Thérèse,

Je vais toujours bien et espère qu’il en est de même de vous. J’ai reçu avant-hier deux lettres de vous l’autre de Suzanne, l’une du 30 juillet et l’autre du 1er août !

J’ai reçu aussi une lettre de ma tante Madeleine du 6 août. J’espère que maintenant les lettres auront des retards moins considérables. En tout cas d’après les ordres officiels, toutes les lettres sont arrêtées 4 jours. C’est ennuyeux mais c’est là une mesure d’une grande prudence.

Nous étions à peu près sans nouvelles, le gouvernement vient de nous faire une sensible en joie en publiant un bulletin des armées, sorte de feuille journalière. Nous savons donc d’après renseignements certains, ce qui se passe à la frontière.

C’est assez réjouissant, les Allemands sont partout contenus ou refoulés et même en admettant que nous progressions peu en avant, cela va bien, parce qu’ils seront vite acculés à la famine. Tout ce que j’avais de sympathie pour ce peuple est tombé, et vraiment ce ne peuvent être que des barbares qui tirent sur les croix rouges, qui ne respectent en rien les populations, qui agissent avec une grossièreté énorme envers les ambassadeurs et l’impératrice douairière de Russie, qui entraîne la Turquie dans une combinaison de receleur par cette histoire fantastique du « Breslau » et du « Goeben ».

Il est certain que Guillaume ne donne pas plus de poids à sa parole et à sa signature que nous en donnons nous-même à son seau ! Que vite sous un dehors de civilisé, l’homme retombe à l’état sauvage et à la brute.

Que je serai heureux, si je pouvais voir dans quelque brasserie, quelques-uns de ces lourds Prussiens, à la tête rasée, cassée, balafrée, vous regardant sournoisement ou insolemment sous leurs lorgnions, s’enfuir en panique au bruit de l’arrivée d’une colonne française !

Nos soldats ont beaucoup d’entrain, et je crois que si un prince allemand ou un Von quelque chose tombait entre leurs mains, nous aurions fort à faire pour les tirer vivants du guêpier… d‘ailleurs à quoi bon conserver ces fourbes cause de tout le mal !

Envoyez-moi des nouvelles de tous.

Je vous embrasse affectueusement,

M. Alliot

Je viens de recevoir des nouvelles. Deux lettres de Thérèse du 1er août et du 12 août, une de maman du 11 août, une de Suzanne du 2 août. Je vous remercie des nouvelles que vous me donnez de tous nos amis.

Il parait que nous venons de remporter une belle victoire du côté du col de Schirmeck. J’espère que papa est complètement remis.

 

 

 

 

III / A la rencontre de l'ennemi, 21-24/08/1914

 

 

La 53e Division d’infanterie se met en mouvement vers le nord le 21 août en deux colonnes (JMO AD53) le groupe parcourant 15 km est appelé à stationner à Lerzy (Aisne). Le lendemain 22 août après avoir parcouru 22 km, le groupe cantonne à Avesnelles (Nord). Le 23 août après avoir atteint Colleret où il est mis en surveillance de la vallée de la Sambre, les batteries cantonnent à Cerfontaine (Nord) après avoir parcouru 30 km. Le 24 le groupe prend position à Colleret face à Marpent et Jeumont (Nord). Dès le 25 août à 4h, face à l’avancée des troupes allemandes et au reflux des unités britanniques engagées en Belgique, la retraite s’engage sans que l’unité ait combattu.

 

 

Durant cette montée en ligne, Maurice Alliot n’adresse qu’une courte lettre rédigée au soir du 22 août, probablement depuis Avesnelles (Nord).

 

 

Documentation connexe voir :

 

Journal des marches et opérations du 1er groupe d’artillerie de la 53e Division de réserve, groupe de renforcement du 43e régiment d’artillerie (Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées 26 N 980/12).

 

Journal du capitaine Girard : Anonyme - Sur le front occidental avec la 53e Division d’infanterie. I Août 1914 à Mai 1915 La guerre de mouvement. En secteur à Suzanne. Paris, Berger-Levrault ed. 1932. Tome I, chapitre III A la rencontre de l’ennemi, pp. 18-25.

 

 

 

 

Correspondance n°5 [Avesnelles (Nord)]

 

 

 

22 août 1914

Mes chers parents

L’heure tardive m’oblige à envoyer une courte lettre. Je vais bien et n’ai pas encore subi les rigueurs de la guerre.

J’espère que vous avez reçu de mes nouvelles maintenant.

Comment allez-vous tous et que fait Thérèse. Les lettres sont attendues impatiemment. Toujours rien de Laon. Mais je ne suis pas très inquiet.

Nous nous approchons de la ligne de feu.

Je vous embrasse tous trois bien affectueusement.

M. Alliot

 

 

 

 

IV / La retraite, 25/08 - 05/09/1914

 

 

Le 25 août la 53e division d’infanterie de réserve s’engage depuis la frontière Belge, dans une longue marche de retraite vers le sud qui se poursuit durant treize jours (JMO AD53).

 

Au cours de ce périple, la division se trouve engagée les 28 et 29 août dans les combats de la Bataille de Guise pour tenter de stopper l’avancée allemande sur l’Oise. Pour la première fois les batteries du groupe d’artillerie ouvrent le feu sans qu’aucune perte ne soit enregistrée. Le repli vers le sud reprend néanmoins dès le 30 août et s’accélère pour s’achever le 5 septembre à Beauchery-Saint-Martin (Seine-et-Marne) après avoir parcouru plus de 250 km.

 

 

Seuls deux courriers de Maurice Alliot se rattachent à cette période.

 

Le premier est une courte lettre probablement écrite au soir du 26 août à la Neuville-lès Dorengt (Aisne) où le groupe bivouaque à l’issue des deux premiers jours de la retraite, les unités françaises étant talonnées par l’ennemi.

 

La rédaction de la seconde lettre peut être située dans la vallée de l’Oise, débutant le 29 août durant la Bataille de Guise probablement à Renansart (Aisne), poursuivie le 30 et achevée le 31 août entre Bertaucourt-Epourdon et Fressaucout (Aisne) et ce avant que l’unité ne reprenne sa marche vers le sud via Quincy-Basse, franchisant l’Aisne le lendemain 1er septembre au matin à Missy-sur-Aisne, puis la Marne le 3 septembre à Mont-Saint-Père (Aisne).

 

 

Documentation connexe voir :

 

Journal des marches et opérations du 1er groupe d’artillerie de la 53e Division de réserve, groupe de renforcement du 43e régiment d’artillerie (Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées 26 N 980/12).

 

Journal du capitaine Girard : Anonyme - Sur le front occidental avec la 53e Division d’infanterie. I Août 1914 à Mai 1915 La guerre de mouvement. En secteur à Suzanne. Paris, Berger-Levrault ed. 1932. Tome I, chapitre III A la rencontre de l’ennemi, pp. 39-50.

 

 

 

 

Correspondance n°6 [Le Grand-Foucommé à La Neuville-lès Dorengt (Aisne)]

 

 

26 août 1914

Mes chers parents

J’ai enfin quelques minutes pour vous écrire. Le principal pour vous est que je vais bien. Nous n’avons pas trop souffert jusqu’ici, cependant il faut des estomacs complaisants et on ne mange pas à sa faim tous les jours.

Nous faisons des marches et contre marches auxquelles nous ne comprenons pas grand-chose, mais si nos généraux nous les font faire, c’est qu’ils ont une raison.

J’espère qu’à Paris vous allez bien. Je vous remercie de vos nouvelles que vous m’envoyez tous les jours, quoi que bien peu arrivent ! J’ai eu aujourd’hui deux lettres de vous du 13 août, une lettre de Thérèse, une de Jeanne Mengus et 2 de Suzanne.

Depuis 5 jours, je n’avais rien reçu.

Je m’efforce d’avoir tout le courage nécessaire car nous voyons quelquefois de bien tristes choses !

Je vous embrasse bien affectueusement tous trois et pense en vous écrivant au moment lointain peut-être où nous serons à nouveau réunis à Rémilly.

M. Alliot

 

 

 

Correspondance N°7 [entre Renansart (Aisne) et Fressaucourt (Aisne)]

 

 

29 août 1914

Mes chers parents,

Je vous écris du bord de la route, par un beau soleil, pendant une bataille importante, qui je l’espère, sera décisive et à notre avantage.

Elle se passe malheureusement en France et notre pays a dû probablement encore souffrir de l’invasion. Espérons que personnellement nous n’aurons pas trop de dégâts à constater ; d’ailleurs j’espère que les Anglais et nous repasserons bientôt là refoulant les casques à pointe.

Que j’ai vu de tristes choses ces jours derniers ! Tous ces pauvres habitants fuyant précipitamment avec un mince bagage.

Quelques-uns venaient depuis Liège.

Il y aura là des pertes matérielles que nous réparerons avec les milliards de nos sauvages ennemis. On doit d’ailleurs être sans pitié pour des gens qui agitent le drapeau blanc et tirent sur les braves de bonne foi qui s’approchent ; qui revêtent les uniformes de leurs ennemis et sèment la confusion, qui cachent leurs mitrailleuses derrière de pauvres femmes.

Jamais je n’aurai cru qu’au XXe siècle, une nation qui se dit civilisée, put commettre de telles terreurs.

Notre nature nous empêche d’y répondre de même [je l’espère ?], mais je crois que les cosaques n’auront pas la même délicatesse.

Jusqu’ici j’ai bien supporté la faim, qui n’a jamais été exagérée et la fatigue. Nous avons fait beaucoup de kilomètres, bouclant presque complètement une boucle.

Nous avons été mêlés aux Anglais et il y a beaucoup de sympathie entre les soldats des 2 nations.

Nous avons aussi des tirailleurs, des zouaves des chasseurs d’Afrique.

Tout cela forme un cariolage assez amusant. J’ai reçu de vos nouvelles des environs du 20, j’ai eu aussi des nouvelles de Rouen et de Suzanne.

30 août Je continue ma lettre interrompue hier par notre mise en batterie. J’ai vu une maison mise à mal par les uhlans, ce n’était pas beau.

Aujourd’hui la bataille continue et semble bien aller, ce matin nous sommes sans grande besogne. Il fait un beau soleil, nous sommes dans un champ en position d’attente.

On fait du plein air. On couche en plein champ, on y fait la cuisine, on y dort etc.

31 août Peut être aurai-je le temps aujourd’hui de terminer ma lettre, les Allemands nous font  [……] … sont durs à avaler.

J’espère tout de même que tout va bien et je vous embrasse bien affectueusement.

M. Alliot

 

 

 

 

V / Bataille de la Marne, 06 - 13/09/1914

 

 

Au terme des 13 jours de leur repli, les batteries de l’AD53 sont parvenues à Beauchery-Saint-Martin (Seine-et Marne) le 5 septembre 1914.

 

Dès lendemain débute la contre-offensive (Bataille de la Marne). Après des engagements les 6 et 7 au sud de Montceaux-lès-Provins, le groupe participe à la poursuite de l’ennemi suivant un itinéraire de 140 km (JMO AD53) jusqu’aux rives de la Vesles à l’ouest de Reims, où il reprend le combat le 12 septembre à la limite nord de Savigny-sur-Ardres ouvrant le feu sur les limites nord de Jonchery (Marne). Dès le 13 septembre les batteries prennent position à Berry-au-Bac pour assurer la défense du front en voie de stabilisation sur l’Aisne.

 

 

Le 1er groupe (43e RA) de l’AD53 ne compte durant cette période qu’un seul blessé le lieutenant Ragaine de l'état-major du groupe, touché le 6 septembre à l’échelon au sud de Montceaux-les-Provins, par une balle de schrapnell).

 

Un seul courrier daté du 8 septembre fait état de la reprise de la marche en avant. Celui-ci a peut-être été rédigé durant le trajet parcouru entre Montceaux-les-Provins (Seine-et-Marne) et Villeneuve-la-Lionne (Marne), mais plus probablement à l’issue de cette avancée de 11 km, lors du bivouac organisé dans le village Belleau, sur les rives du Grand Morin.

 

Nous devons y adjoindre un long courrier daté du 13 septembre, rédigé au premier jour de la prise de position au Nord-est de Berry-au-Bac face à Guignicourt, le cantonnement du soir étant établi à Juvincourt-et-Damary. Il ne rend pas compte des évènements du jour mais retrace son parcours depuis l’entrée en guerre de manière rétrospective. On regrettera que celui-ci soit malheureusement tronqué alors qu’il semble évoquer ses conditions de vie quotidiennes.

 

Documentation connexe voir :

 

Journal des marches et opérations du 1er groupe d’artillerie de la 53e Division de réserve, groupe de renforcement du 43e régiment d’artillerie (Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées 26 N 980/12).

 

Journal du capitaine Girard : Anonyme - Sur le front occidental avec la 53e Division d’infanterie. I Août 1914 à Mai 1915 La guerre de mouvement. En secteur à Suzanne. Paris, Berger-Levrault ed. 1932. Tome I, chapitre III A la rencontre de l’ennemi, pp. 76-79.

 

 

 

Correspondance n°8 [Belleau à Villeneuve-la-Lionne (Marne)]

 

 

8 septembre

Mes chers parents

Je reçois à l’instant une carte de vous du 31 août, elle m’a fait grand plaisir, car il y a longtemps que je n’avais eu de nouvelles. Je suis très heureux de vous savoir en bonne santé, de plus, cette carte me tranquillise sur les Laonnois, que je suis content de savoir à Paris.

Nous avons fait des marches en quantité. Elles étaient heureusement commandées, sinon elles auraient été bien démoralisantes ? Nous avons repris la marche en avant, c’est autrement agréable.

J’ai perdu ma cantine, mon manteau, mon ordonnance et oui, tout le même jour.

Le beau temps nous a heureusement favorisé.

Vous avez eu peu de nouvelles de moi ces temps-ci, je n’ai pas eu le temps d’écrire, car nous avons marché jour et nuit (une fois 36h). Nous avons de plus perdu 36 sacs de correspondance. S. étant à Paris communiquez-lui cette carte. Je lui écrirai la prochaine fois. Embrassez-la pour moi, de même que je vous embrasse affectueusement tous trois.

M. Alliot

 

 

Correspondance n°9 [Berry-au-Bac – Juvincourt-et-Damary (Aisne)]

 

13/09/1914

Mes chers parents

Je vous écris cette fois assis sur un canon qui se repose après avoir frappé sur un pays cher aux Limasset, je crois : Jonchery.

Nous sommes près de Reims.

Nous avons fait des quantités de kilomètres depuis Versailles, et maintenant que les choses vont bien, j’espère que mon itinéraire rétrospectif ne sera pas arrêté par la poste.

De Versailles nous sommes allés à Marle [Aisne], puis sommes passés auprès de Vervins [prise de position à Laigny (Aisne)], ensuite à la Capelle [Aisne], Avesnes, près de Jeumon [et] Maubeuge [Nord], sommes revenus passer entre Landrecies et Avesnes [Nord], puis sur l’Oise à Vendreuil et Moy [Moy-de-l’Aisne (Aisne)], avons traversé la Marne près de Château-Thierry [Aisne], sommes passés à Montmirail [Marne] et avons reculés jusqu’à Beauchery [Beauchery-Saint-Martin (Seine-et-Marne)] entre Meaux et Provins.

Toute cette marche en arrière s’est faite presque sans combat, mais a été assez démoralisante à cause du manque de renseignements. Nous étions très inquiets n’ayant aucune certitude sur les causes de la retraite.

Maintenant nous sommes franchement repartis en avant et tout va bien.

Nous avons été assez malheureux au point de vue des chevaux et nos grandes randonnées nous en ont fait perdre pas mal. Nous n’avons pas eu d’hommes malades et n’avons pas été trop fatigué.

D’ailleurs, le beau temps nous a favorisé et la vie au grand air avait ses charmes.

Nous nous étendions sur la paille dans un champ à côté de nos hommes et de nos chevaux enroulés dans nos manteaux et nos couvertures.

Malheureusement et depuis 2 jours, il pleut et il fait froid. J’ai heureusement trouvé des abris pour la nuit.

Pour la nourriture au début, nous avions un cuisinier, puis pour simplifier nous nous sommes mis en subsistance dans une pièce.

Je crois que maintenant […]

les 2 systèmes.

Les soins de propre […]

on se lave quand […]

n’arrive que tous les j […]

resté 8 jours sans n […]

ment, je n’avais p […]

On change de linge […]

cantine, mais la […]

grosse difficulté […]

a le temps de fai […]

qu’un jour pou […]

pourrai faire fair […]

Nos approvisionne […]

pas très régulièrem […]

s’arrange, il y a […]

dans les champs,

fermes (sauf qua […]

ont précédés, ou […]

moutons ou des ve […]

Pour ce qui est […]

surtout vu des fr […]

de sales têtes de pr […]

[…] enchantés d’en

[…] divisionnaire. Il ont

[…] er à toute notre artillerie

[…] oup de villages dévastés

[…] ment tout le linge

[…] , le mobilier sortant

[…] hors, renversent les

[…] iroirs et

[…] brisent à peu

[…] ui ne peut leur servir.

[…] respectant les maisons.

[…]

[…] isposé à la […tré]   pour

[…] vu tout cela.

[…] us allez tous bien

[…] mon oncle, chez les

[…] ouen

[…] de transmettre cette

[…] que vous embrasserez

[…] t pour moi.

[…] asse bien affectueuse

[…] Thérèse

M. Alliot

 

 

 

 

VI / Secteur de Berry-au-Bac, 13/09 - 04/10/1914

 

 

L’arrivée de l’unité sur l’Aisne dans le secteur de Berry-au-Bac et Sapigneul, marque la phase de stabilisation du front qui s’accompagne durant les trois premiers jours, de duels d’artillerie qui provoquent les premières pertes importantes.

 

Dès les 13 et 14 septembre le 1er groupe compte ainsi deux blessés dont le lieutenant Stiassnie, officier orienteur et pour la seule journée du 15, alors qu’il est en batterie sur la cote 108 et la croupe 91 à Sapigneul, on dénombre deux tués et quarante-quatre blessés parmi lesquels deux officiers : le capitaine Girard commandant la 23e batterie (évacué) et le lieutenant Lamarzelle, commandant la 21e batterie, dont le sous-lieutenant Maurice Alliot est l’adjoint. Le groupe perd ce même jour 164 chevaux.

 

(Fonds de carte extrait du JMO AD53 et Géoportail IGN)

 

Dès le lendemain 16 septembre, le groupe est mis en batterie à 3 km à l’arrière des premières lignes, cote 186 au sud-ouest de Cormicy (bois de la Grande montagne). Avec pour mission de participer au maintien de l’intégrité du front, il conserve cette position durant deux semaines. L’unité quitte ensuite le secteur le 4 octobre pour se rendre avec la 53e DI dans la Somme.

 

C’est ici que le 20 septembre, Maurice Alliot est blessé et évacué du front. Il ne rejoint la 21e batterie que le 10/11/1914 alors qu’elle a changé de secteur.

 

Répartition de l’AD53 le 20/09/1914, secteur de Berry-au-Bac et Sapigneul

(Fonds de carte extrait du JMO AD53)

 

 « Les 21e et 22e batteries après avoir tiré le matin vers 91 et 108 sur de l’infanterie, les batteries sont soumises de 8h à 8h30 au feu des obusiers allemands, elles ont 10 blessés dont le s/lt Alliot et 4 chevaux tués » (JMO AD53).             

« A 8 h00, les obusiers allemands ouvrent le feu sur les batteries de la cote 186. Tir arrêté à 8h30. Pertes subies 10 blessés dont 2 grièvement - s/lt Alliot 21e batterie éclat d’obus au cou – 4 chevaux » (JMO 1er groupe d’artillerie de la 53e DR).

 

« Blessé le 20 septembre est resté à son poste, refusant d’être pansé avant ses hommes » extrait de la citation à l’ordre de la division en date du 22/10/1914 (Reg. de matric.)

 

En dehors du courrier daté du 13 septembre vu plus haut, M. Alliot n’adresse durant cette période qu’un seul autre message de quelques lignes rédigé sur une carte de correspondance, semble-t-il au cours de son transfert d’évacuation les 21 ou 22 septembre.

 

 

Documentation connexe voir :

 

Journal des marches et opérations du 1er groupe d’artillerie de la 53e Division de réserve, groupe de renforcement du 43e régiment d’artillerie (Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées 26 N 980/12).

 

Journal du capitaine Girard : Anonyme - Sur le front occidental avec la 53e Division d’infanterie. I Août 1914 à Mai 1915 La guerre de mouvement. En secteur à Suzanne. Paris, Berger-Levrault ed. 1932. Tome I, chapitre III A la rencontre de l’ennemi, pp. 90-105.

 

 

 

Correspondance n°10 [non située]

 

 

21 -2 septembre

Mes chers parents

Je suis légèrement blessé. On m’évacue probablement sur Maintenon près Versailles. Je vous envoie cette carte grâce à l’obligeance de la femme d’un médecin de Rouen.

M. Alliot

 

 

 

 

 

 

VII / Secteur de Suzanne et Maricourt, 01/10/1914 - 27/04/1915

 

L’AD53 quitte l’Aisne le 4 octobre, se dirige par route via Fère-en-Tardenois et Villers-Cotterêts (Aisne), Compiègne (Oise), Montdidier et Bray-sur-Somme (Somme), pour prendre position à partir du 16 octobre au nord de Suzanne (Somme) (JMO AD53). Il y relève les batteries de l’artillerie de la 11e division d’infanterie.

 

C’est par voie ferrée que Maurice Alliot rejoint le 10 novembre 1914 le groupe et la 21e batterie après un éloignement du front d’une cinquantaine de jours.

 

 

S’ouvre alors avec ses parents une longue période de quatre mois de correspondance formée de 13 courriers, généralement lettres de plusieurs feuillets riches de multiples anecdotes, mais aussi de ressentis et réflexions sur le conflit que nous avons analysé dans les derniers paragraphes de notre introduction générale.

 

Passant par Bray-sur-Somme, siège du quartier général de la 53e DI, il gagne Suzanne où le poste de commandement du groupe du 43e RA est installé au château.

 

Celui-ci relève du secteur gauche de l’AD53, placé sous le commandement du Commandant Larras : groupes du 11e et 43e renforcés de 2 pièces de 90 et d’une batterie de 155 (4e batterie du 3e Régiment d’artillerie lourde).

 

Positions de l’AD53 à la date du 23/10/1914 (JMO AD53).

 

Les batteries du 43e RA sont en position à 800 m au sud-ouest de Maricourt et depuis le 25 octobre elles s’y relaient par roulement sur trois jours, deux étant en ligne, la troisième étant mise en repos à Suzanne. Les officiers y cantonnent chez l’habitant, les hommes du rang bivouaquant sous tente dans les bois. Il s’agit du lieu privilégié pour la rédaction des premiers courriers (cf. correspondances n°11 à 15, 19 et 20).

 

Suzanne (Somme) cartes-postales vers 1910.

 

A partir du 7 janvier intervient une modification dans la rotation des batteries, avec désormais une période de repos de huit jours à Etinehem lieu de cantonnement des échelons du train régimentaire. La 21e batterie semble ne bénéficier de cette semaine au cantonnement qu’à compter du 23 janvier (cf. correspondances n°16 à 18 et 21 à 23).

 

Etinehem (Somme) cartes-postales (1914-1918).

 

Cette période de repos offre aux officiers la possibilité d’effectuer des excursions dans les environs, Maurice Alliot rendant ainsi compte de la découverte d’Albert (cf. correspondance n°22), ville distante d’une dizaine de kilomètres très éprouvée dès la fin septembre 1914, durant la Course à la mer.

 

Albert (Somme), février-mars 1915.

(Section photographique de l'armée - coll. numérique de la BDIC

Albums Valois VAL 437/100 et VAL 437/094)

 

Maurice Alliot a également la possibilité de se rendre jusqu’à Amiens distante de 35km, où se déroulent plusieurs courtes entrevues avec ses proches venus à sa rencontre (cf. courriers n°18 et n°23).

 

Toute cette période est principalement marquée par le maintien des positions. Duels d’artillerie mais aussi accidents de tir liés à l’éclatement des pièces (cf. correspondance n°15), qui occasionnent durant ces six mois 4 tués et 20 blessés au sein du groupe du 43e RA. Le principal engagement auquel il participe, est l’offensive lancée par la 53e DR du 17 au 21 décembre 1914 en appui au 11e CA, avec comme objectif la prise de Mametz située à 4km au nord-ouest de Maricourt (JMO AD53). Aucune perte n’est alors à déplorer malgré l’intensité des combats.

 

L’AD53 relevée par l’AD28, quitte les positions de Maricourt et le secteur de Suzanne le 27 avril 1915. Après un séjour à Lucheux (Somme) du 30 avril au 2 mai, le groupe du 43e RA, mis à la disposition du 10e CA, prend position le 4 mai à Dainville (Pas-de-Calais) pour participer à une offensive générale lancée pour percer le front ennemi au Nord d’Arras (JMO 1er groupe d’artillerie de la 53e DR).

 

La correspondance conservée ne rend pas compte de cette nouvelle phase, l'ultime courrier conservé datant du 22 mars 1915, alors qe Maurice Alliot envisage de rencontrer à nouveau ses parents à Amiens.(cf. correspondance n°23).

 

 

Documentation connexe voir :

 

Journal des marches et opérations du 1er groupe d’artillerie de la 53e Division de réserve, groupe de renforcement du 43e régiment d’artillerie (Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées 26 N 980/12  du 04/10 – 16/12/1914 et 26 N 980/13 du 17/12/1914 au 27/04/1915).

 

Journal du capitaine Girard : Anonyme - Sur le front occidental avec la 53e Division d’infanterie. I Août 1914 à Mai 1915 La guerre de mouvement. En secteur à Suzanne. Paris, Berger-Levrault ed. 1932. Tome I, chapitre III A la rencontre de l’ennemi, pp. Girard I p. 141-188.

 

 

 

Correspondance n°11 [Suzanne (Somme)]

 

 

10 novembre 1914

Me voici arrivé à mon groupe après un voyage de 48h. Départ à 8h, arrivée à Achères [Yvelines] à 9h1/2. Déjeuner, départ à 12h1/2 arrivée à Creil [Oise] à 3h. Sur le trajet, à partir de l’Isle-Adam [Val-d’Oise] on voit des tranchées, des ponts démolis et aspect plus triste des champs abandonnés et hirsutes, la terre est abandonnée.

J’ai dîné à Creil, toujours en compagnie de Desnoyers. A l’hôtel j’ai vu les filles de Mr Delatroche, fabricant d’eaux gazeuses à Laon. Ce sont des cousines des Bertrand qui connaissent bien tous nos amis et se sont enquis d’eux.

Elles n’ont pas de nouvelles de Laon.

Je suis parti de Creil à 6h1/2 du soir, suis passé à Longueau [Somme)] et nous sommes arrivés à la gare de débarquement à 4h1/2 du matin, en compagnie d’artilleurs versés dans l’infanterie. A 9h, l’intendant militaire est arrivé. Il m’a donné une voiture pour rejoindre le groupe, mais comme la voiture était chargée et le cheval fatigué, je n’ai pu aller que jusqu’à Bray-sur-Somme (Somme), où j’ai retrouvé le colonel Massenet, ce dernier m’a fait bon accueil, m’a donné une chambre et j’ai dîné avec lui.

Le lendemain matin, je suis parti avec un fourgon à 4 chevaux, le long de la Somme. Ce voyage me rappelait ces anciennes gravures, des coches et diligences de temps plus anciens.

A 9h1/2 je débarque. « Tiens Alliot, c’est chic ça ! » Voilà la réception de Lamarzelle, puis je retrouve installés dans une salle d’épicerie débit, où on fait de popote, presque tous les camarades. Ils ont tous une mine excellente, sont bien ravitaillés en vivres et en lainages.

Néanmoins, mes boîtes de conserve ont été les bienvenues.

Tout le monde mange ensemble, on est de 12 à 18 à table, car outre le 75, il y a du 90, du 120 du 155 et il y a des officiers de ces artilleries qui sont quelquefois avec nous.

J’ai des difficultés de logement.

Le Lieutenant Cardon loge dans une maison où la propriétaire a un lit, elle est à Paris, sa mère n’a pas voulu me donner la clef, et comme c’est le seul lit disponible, je suis obligé d’y coucher en fraude en passant par la fenêtre.

Cela me plait peu, mais je n’ai pas le choix.

Nos batteries sont cantonnées près du village dans un bois. Depuis que je suis parti, tout le monde a appris à se défiler très bien aux avions. Il y a des cahutes creuses en terre et couvertes de feuilles. On marcherait dessus sans les voir.

Les voitures sont habillées avec des feuillages.

On construit des abris pour les chevaux, car il y a du brouillard et il fait plus froid depuis quelques jours.

Les hommes ont tous bonne mine. Ils sont bien pourvus et viennent de toucher des tentes.

Mes paquets ne sont jamais arrivés, mais les hommes sont bien ravitaillés en linge et lainages. Ils cantonnent dans des granges.

On a plus de mal à se procurer du harnachement et des effets utilitaires. On a envoyé des pantalons de velours.

On envoie les chevaux à l’arrière afin de les soigner quand ils sont malades ou fatigués. En somme, on répare les dégâts de la retraite.

J’ai retrouvé mon cheval un peu maigre, mon harnachement culotté et percé d’un éclat d’obus (fin septembre) ma cantine, mon caoutchouc, ma couverture et Siefridt. Il aura probablement besoin d’être remis dans le creux de la main.

J’ai été satisfait qu’il ait pensé à faire blanchir le linge que j’avais ici, ce qui fait que j’ai tout retrouvé en bon état.

Au point de vue hostilités, c’est assez calme et on tire peu.

Il y a 2 batteries à quelques km d’ici, ce qui fait qu’on est de repos, un jour sur 3. Une seule batterie reste la nuit. On couche donc 2 fois sur 3 au cantonnement et une fois dans les tranchées.

Le commandant Mendès a été très gentil et tient à ce que je me remette en route doucement. Ainsi ma batterie est sur la position. Je n’irai que demain après la nuit qu’elle passe dans les tranchées.

Excusez l’écriture, je me bats avec la plume, le porte-plume et l’encre.

Embrassez bien Suzanne et Thérèse pour moi. Je vous embrasse bien affectueusement.

M. Alliot

Même adresse

 

 

 

Correspondance n°12 [Suzanne (Somme)]

 

 

15 novembre 1914

Mes chers parents

J’ai écrit hier à Suzanne. A vous aujourd’hui. La vie est assez régulière et n’alimenterai certainement pas 2 missives par jour.

J’ai eu, 1 fois de vos nouvelles, j’espère en avoir d’autres ce soir.

Nous sommes de repos aujourd’hui à S. [Suzanne]. Je me suis levé à 7h1/2, mon ordonnance a mis 2h à débarrasser mes effets de la boue que j’ai attrapé hier et avant-hier à la position de batterie.

Petit déjeuner : café au lait. A 10h j’ai été à la grand’ messe. Il y avait beaucoup de soldats quelques officiers. Beaucoup avaient été à la messe à 8h.

Il y avait aussi quelques habitants. L’harmonium était tenu par un soldat, d’autres faisaient l’office de chantres. J’ai d’ailleurs été un peu étonné de constater le nombre de soldats chantant les psaumes. Ces chants entonnés par des voix mâles et naïves ne manquaient pas de grandeur. Il semblait bien là que beaucoup se souvenaient de leur jeunesse et se dégageaient de la matérialité de leur vie habituelle et avaient des pensées et des préoccupations plus hautes que leurs habituels soucis.

Déjeuner en commun de tous les officiers que leur besogne n’appelait pas à la position de batterie. Il y avait le commandant Larras faisant fonction de Lieutenant-colonel, les lieutenants adjoints au commandant, agents et commandants de l’échelon, Lamarzelle, Fournier et moi.

Nous remontons demain matin à 6h pour redescendre après-demain soir à 5h. Le temps n’est pas beau, il fait froid et il pleut. Aussi je n’ai- fourré le nez dehors que de la quantité indispensable.

Après le déjeuner, lu les journaux, ils arrivent à peu près régulièrement. Nous avons même eu l’Illustration du 7 novembre, rapporté par Cardon qui avait été à Amiens.

Amiens est notre centre de ravitaillement. Il y allait pour acheter des culottes de velours pour le groupe et, en plus ravitailler nos cuisiniers en conserves, confitures, alcools etc, faire de commissions des officiers…. Pour ma part, j’ai acheté une vareuse molletonnée en gros drap bleu que je mets par-dessus celle que j’ai fait faire à la Belle Jardinière. On l’endosse bien et c’est plus commode que d’avoir toujours le grand manteau bleu. Celui-ci est peu commode pour aller et venir, monter et descendre des tranchées. J’ai marché dessus des quantités de fois hier et avant-hier.

J’ai fait réparer la culotte que j’avais dans ma cantine, on lui a remis des genoux, mais pas de fonds. Je suis très content de mes chaussures, bien graissées elles me mettent à l’abri et j’ai chaud. J’ai fait un tour au cantonnement de la batterie. Les écuries se font peu à peu et les hommes améliorent leurs cahutes, beaucoup y ont fait des cheminées en terre qui chauffent pas mal.

Avez-vous de bonnes nouvelles de tous ? J’espère avoir une lettre de vous, ce soir et une de Suzanne. Embrassez-la bien pour moi, ma chère petite fiancée.

Je vous embrasse tous les trois bien affectueusement.

M. Alliot

On, fait des jeux de mots intéressant la direction. Quand mon mari court après Suzanne, Albert Braie.

 

 

 

Correspondance n°13 [Suzanne (Somme)]

 

 

30 novembre 1914

Mes chers parents

Toujours rien de bien neuf et nous ne savons guère plus de choses que vous sur ce qui se passe ou pourra se passer d’ici quelques jours. La canonnade semble un peu plus violente depuis hier matin, peut-être la période de recueillement que je suppose, va-t-elle se terminer.

Notre batterie a été anéantie hier, nous avons subi 1h de bombardement par de grosses marmites, l’Etat-major allemand des unités devant nous doit se frotter les mains, mais malheureusement tous les coups étaient 1000m courts et il n’y a eu aucun blessé. Naturellement nous avons cessé de tirer dès le commencement de la « destruction » et n’avons plus tiré que longtemps après, afin de laisser les boches sur l’idée qu’ils avaient la bonne hausse.

Par exemple, il y avait un colonel d’infanterie dont le poste n’était pas éloigné des marmites, il nous a téléphoné, il était un peu agité : « Alors, vous pouvez m’assurer que ce n’était pas sur moi qu’on tire ? » - « Oui mon colonel, car c’est sur nous. » - « Bon alors, ça va bien. » Vous ne trouvez pas que le « ça va bien » est épatant.

Notre vie est toujours la même. Nous sommes descendus hier, notre batterie est au repos aujourd’hui.

Je vais en profiter pour aller à cheval jusqu’à Bray où j’espère voir Robert Bonnel qui est adjudant adjoint au commandant du 2e bataillon du 45ème régiment d’infanterie, 53e division de réserve.

Il résulte de cette adresse que le 45ème est adjoint à notre division et que je pourrai probablement voir Bonnel de temps en temps.

Vous ai-je dit que le groupe de divisions de réserve était disloqué et que le général Valabrègue n’a pas eu plus de chances que son frère.

Nous faisons partie de l’armée du général Castelnau et sommes je crois entre le 14ème et le 4ème Corps.

Je n’abandonne pas le 45ème, mais ici la nouvelle à communiquer est plus triste : le commandant Marconnet a été tué dans une tranchée du 228ème, à Maricourt, vendredi matin 27 novembre. Il a été enterré dans le cimetière de Suzanne en bordure, face à l’église, dans un emplacement où il y a déjà pas mal de soldats et que la commune rachètera pour l’annexer au cimetière. Il a été tué d’une balle dans l’œil. Je ne sais pas si les Limasset le connaissaient, mais comme on peut être en rapport avec des gens du 45, j’envoie le renseignement.

Je vous ai envoyé avant-hier un colis contenant une culotte d’été et une tunique presque neuve qui était ma tunique de sortie. Elles ne peuvent me servir à rien en ce moment et tiennent une place inutile dans la cantine, où je les ai remplacées par une culotte de troupe.

J’ai reçu hier la carte de papa du 24 novembre. J’espère recevoir bientôt le petit colis de chocolat et les genouillères que j’ai demandées.

J’ai reçu hier une lettre de mon oncle Félix. Il me dit qu’il pense qu’André sera pris pour le service. Il a vu ma citation dans le journal de Rouen et me félicite.

J’ai reçu ma lettre de Suzanne, me donnant des nouvelles de Bohain et de Laon. Quel ennui qu’on ne sache ce que sont devenus les Bertrand. Quant à nos affaires de Bohain, je crois qu’on peut malheureusement les classer dans le souvenir. Sales Boches.

On a fusillé le Doyen. Connaissez-vous la raison (!) de ce nouveau crime ?

J’ai des draps, je fais blanchir mon linge, il fait moins froid.

Nous avons mangé du raisin, et de salade d’orange, nous avons pas mal de conserves. Je vous embrasse bien affectueusement tous les quatre. Mes meilleures amitiés chez oncle et chez Monsieur Limasset.

M. Alliot

 

 

 

Correspondance n°14 [Suzanne (Somme)]

 

 

1er janvier 1915

Ma chère maman,

Mon cher papa,

Et ma chère Thérèse,

Je vous nomme tous, afin qu’à vous trois aillent mes premières pensées de l’année, à vous comme elles vont aussi à Suzanne à qui j’écris aussi.

Je suis loin de vous, mais mon cœur et mon esprit sont à Paris.

Je me plonge volontiers aujourd’hui dans le souvenir, et puis le faire d’autant plus tranquillement que je suis seul à la batterie jusqu’à ce soir, quand Lamarzelle rentrera de son poste d’observation.

Alors, je pense à tous ceux que j’ai laissé derrière moi, et leur santé et bonheur.

Au fonds, j’aime mieux passer ainsi mon premier janvier, qu’en bas, au milieu de mes camarades, dont l’amitié m’empêcherait de penser à des amitiés plus sérieuses et plus profondes.

Je passerai très bien ma journée à lire en soignant mon feu.

Les sous-officiers de la batterie viennent de venir me souhaiter une bonne année, que je leur ai souhaité aussi très cordialement car les liens se forment vite entre gens qui vivent ensemble à la guerre et j’attends maintenant mon déjeuner.

Nous avons été gâtés ces jours-ci et avons en des tas de bonnes choses, huitres, oies, bon vin, sucreries, champagne etc. Cela nous a permis de connaître que les jours étaient jours de fête.

Hier, j’ai assisté à la remise de la médaille militaire au maréchal des logis, héros de l’histoire racontée dans une lettre à Suzannne, puis le général nous a souhaité une bonne année.

Le commandant Larras, qui faisait fonction de lieutenant-colonel, a été nommé à ce grade avant-hier. Son caractère s’en ressentira.

Quant à moi, la proposition pour la 2e ficelle, tombe d’elle-même, par suite d’une circulaire du général Joffre, requérant 2 ans de grade au moins, et je n’ai que 15 mois.

J’ai reçu hier une très gentille lettre de Madame Limasset, qui m’a fait beaucoup de plaisir.

J’ai reçu aussi une lettre de vous du 27. Je constate que vous continuez à vous occuper des soldats blessés de la rue Picpus, cela est un bon moyen de prendre part à la guerre.

Enfin cette lettre me donne des nouvelles de Madame Brisset que vous embrasserez pour moi.

Merci bien de la pensée de m’envoyer quelques livres, cela me fera assurément plaisir. J’espère que tous continuent à aller bien. Je pense que les grippes de bonne maman et ma tante vont mieux et même sont complètement terminées.

Je viens d’apprendre que de Lamarzelle est enfin nommé capitaine officiellement. Cela fera plaisir à tout le monde.

Je vous embrasse tous trois très affectueusement. N’oubliez pas de m’écrire souvent, cela me fait un très grand plaisir.

M. Alliot

 

 

 

Correspondance n°15 [Suzanne (Somme)]

 

 

8 janvier 1915

Mon cher papa,

Je t’écris après une bien triste journée, nous avons eu un accident navrant, ma pièce a fait explosion, ceci au 8ème coup tiré à explosifs. J’ai eu un tué et 2 blessés. Par une chance inespérée dans cet accident je n’avais que 3 servants et le chef de pièce pour assurer le service, et par une chance providentielle, le chef de pièce n’a rien eu. Des deux blessés, l’un a une jambe cassée, l’autre est atteint à la tête, à la jambe, mais ni l’un, ni l’autre ne semblent très grièvement blessés, ni en danger.

Dans un cas analogue, il y a eu 3 tués ; dans l’explosion d’un 155 : 12 tués. L’accident aurait donc pu être plus terrible.

La pièce est déchiquetée depuis la culasse jusqu’à la jaquette, les roues démolies, le frein de tir sectionné. Nous avons encore eu cette chance que le caisson ne saute pas, il a été démoli dans un compartiment à explosifs et 3 douilles ont été ouvertes, heureusement la poudre de ces douilles n’a pas fait explosion. Nous avons retrouvé des morceaux de la pièce à 300m.

Et cela, pour notre dernière journée avant d’aller nous reposer 8 jours !

Demain nous devions donc passer rapidement à S. nous nous y arrêterons pour le service et l’enterrement de notre pauvre canonnier qui je crois était marié et avait un enfant.

On nous a envoyé un comandant qui a conclu à la faute, non de l’obus, mais de la pièce qui était assez fatiguée. Je préfère cela et nous l’avons dit bien haut afin que nos hommes ne soient pas découragés et ne craignent pas d’employer d’autres projectiles.

J’ai appris la mort du commandant Lavechin, que j’avais connu à Rouen, et de mon camarade de Miol-Flavard de Centrale.

Tristes nouvelles que tout cela.

Les journaux nous ont appris la victoire russe du Caucase, nous nous en sommes réjouis, cela fera tout de même un certain nombre de troupes russes qu’on pourra envoyer ailleurs.

Nous avons lu avec un certain plaisir que le cardinal Mercier était gardé par les troupes allemandes car quelques soient les paroles qu’ait pu dire le cardinal, il y aura des protestations du Saint-Siège (ce qui est déjà fait, je crois) et les Allemands s’alièneront beaucoup de catholiques des pays neutres.

Nous avons cette chance que nos adversaires s’y connaissent en fait de gaffes.

Nous espérons aussi que la république de San Marin va déclarer la guerre à l’Empire d’Allemagne et à ses alliés.

J’ai reçu hier une lettre très gentille de Suzanne Mengus.

Fait bizarre, les parents des officiers du 43e à Caen, se voient assez souvent et Suzanne a ainsi fait connaissance de Madame Garnuchot et de Madame Braun, femmes de mon capitaine et de mon commandant à Caen. Et j’ai été heureux d’apprendre par elle que le capitaine Garnuchot faisait demander assez souvent de mes nouvelles. Hélas je dois dire que je l’ai bien négligé et de toute la campagne ne lui ai pas écrit que pour le jour de l’an.

Je vais bien et espère qu’il en est de même à Paris.

Je vous embrasse tous les trois affectueusement.

M. Alliot

 

 

 

Correspondance n°16 [Etinehem (Somme)]

 

 

24 janvier 1915

Ma chère Maman,

Je t’écris, notre première journée de repos étant à peu près terminée. Nous sommes arrivés ici hier matin.

Installation, revue de cantonnement ; nous avons déniché un piano, nous avons été taper dessus, puis on a joué au bridge, mais nous n’avons pas terminé, car la vieille femme chez qui nous avons notre popote étant malade, nous sommes partis de bonne heure. On m’attend pour terminer le bridge.

Ce matin je me suis lavé. J’ai pris un tub fameux, grâce à un poêle dont je dispose, une marmite et une bassine assez grande.

Mon ordonnance m’a versé des sceaux d’eau en guise de douches, et cela m’a fait un véritable plaisir.

Ensuite j’ai été à la grand messe puis, nous avons eu notre chef d’escadron à déjeuner, ensuite j’ai visité mes cantonnements, j’ai écrit, j’ai passé ma revue 4h et je t’écris.

Sais-tu que je suis un personnage très important. Je suis pour 3 jours commandant de batterie, j’ai 2 chevaux et 1 chien ; mes appartements se composent d’une chambre, d’un cabinet de toilette et d’une salle à manger. Cela change du bois de Maricourt !

Malgré-moi j’écris les noms bien que cela soit interdit !

J’ai failli passer à un Etat-major de brigade d’infanterie. Cela a été très tangent, heureusement Lamarzelle a protesté. Cela m’aurait ennuyé de quitter ma batterie et mon groupe.

Je n’ai pas eu de lettre de vous hier, j’espère que vous êtes toujours en bonne santé et sans crainte des randonnées des Zeppelins.

Décrivez-moi l’aspect de Paris et dites-moi ce que pensent les gens. Cela m’intéresse !

Quel temps avez-vous. Depuis 2 jours nous avons un temps sec et froid, tout le monde s’en réjouit car cela suit une période de grosses pluies.

On va pouvoir ici se nettoyer mais les premiers jours ne sont guère de repos pour les officiers. Il faut trouver du bois, de la paille, de la place et ce qu’il y a de plus difficile en ce moment, des légumes ; les hommes se plaignent de n’avoir que de la viande, mais ils ne se doutent pas des efforts qu’il faut faire pour trouver 10 kg de pommes de terre.

Les nuits sont cependant bonnes, j’ai eu le plaisir de coucher dans une chemise de nuit. C’est une sensation très agréable en temps de guerre.

Mais je t’écris et l’heure tourne. On m’attend au bridge, au fond, j’aime mieux vous écrire d’abord une bonne lettre.

A bientôt de vos nouvelles j’espère. Je vous embrasse tous trois bien affectueusement.

M. Alliot

Neveu n’est-il pas au 45ème ?  Avez-vous son adresse ?

 

 

 

Correspondance n°17 [Etinehem (Somme)]

 

 

10 février 1915

Rien de neuf aujourd’hui, si ce n’est que j’ai vu passer aujourd’hui, une troupe de volontaires, la plupart étrangers et vraiment à l’air très martial. Tous les officiers étaient à pied, et les éclaireurs étaient conduits par un caporal à barbe blanche, qui, nous a-t-on dit, avait 65 ans. Allons, la cause de la France, rallie des dévouements.

Je n’ai pas reçu de lettres aujourd’hui, mais cela ne m’étonne guère.

J’espère que vous êtes tous en bonne santé et vous embrasse affectueusement.

M. Alliot

 

 

 

Correspondance n°18 [Etinehem (Somme)]

 

 

11 février 1915

Ma chère maman,

Naturellement je n‘ai pas eu de nouvelles de vous depuis dimanche, mais j’espère que vous allez toujours bien. J’ai écrit à Thérèse pour vous dire combien j’avais été heureux de vous voir tous, de pouvoir un peu causer, mais le temps si court du contact a fait que j’ai peut-être mal dosé mon temps, excusez-moi, j’avais trop de bonheur à prendre en une seule fois.

Je pense que vous avez bien constaté que je ne suis pas malheureux, au moins physiquement, car moralement je suis loin de ce que je pouvais espérer. Cependant, c’est un grand bonheur de savoir que vos pensées m’accompagnent, et d’avoir tout l’amour de Suzanne.

Il est vrai que cela n’a pas de rapport avec notre rencontre, car je n’ai jamais douté ni de l’un, ni de l’autre.

J’ai cependant senti un besoin depuis dimanche dernier, je n’ai que de vilaines photographies de Suzanne. Je voudrais en avoir une qui fut bien et de bonne facture ; de vous, je n’ai aucune photographie et je serai heureux d’en avoir, de toi, de papa et de Thérèse. Cela m’accompagnerai dans mon isolement.

Aujourd’hui vaccination anti typhoïque de la batterie, les hommes supportent vaillamment la piqure. Ils rient, et il y en a même qui se sauvent avec l’aiguille, on est obligé de courir après-eux.

J’ai aussi assisté à la couture d’un homme qui avait reçu un coup de pied de cheval derrière la tête. Décidément on s’habitue à un tas de choses à la guerre !

J’espère pouvoir vous envoyer bientôt quelques souvenirs moins personnels que ceux que je vous ai donnés. Ce sont des petits ustensiles très utiles et parfaitement inutilisables : porte-plumes, briquets etc fait dans des balles boches. Je n’ai malheureusement pas retrouvé mon presse papier.

Je vous ferai porter tout cela car je pense que de L. ira à Amiens dans quelques temps (8 à 10 jours).

Je vous embrasse bien affectueusement.

M. Alliot

 

 

 

Correspondance n°19 [Suzanne (Somme)]

 

 

28 février 1915

Mon cher papa

J’ai reçu les deux lettres du 24 et du 26 février et suis heureux de savoir que vous êtes en bonne santé et que malgré ta besogne tu n’es pas trop fatigué.

J’ai écrit hier à Rouen, relatant ma visite à M. Gorge et j’ai réédité les remerciements pour le colis que m’a envoyé ma tante. Je n’ai toujours pas de nouvelles de celui de Gabrielle. J’ai reçu le ruban isolant et les cravates et vous en remercie. Remerciez aussi Melle Gague, M. Gardin et M. Maurice des nouvelles demandées.

Comment Etienne a-t-il trouvé son fils ? Je suis heureux de savoir que M. et Mme Bertrand vont bien. L’affaire Connolly semble en bonne voie. Le chiffre de 25 000 pour le 5ème me parait bien excessif, divisons par 5. Je te remercie de me tenir au courant des faits et gestes de nos ouvriers mobilisés. Cela me fait plaisir. Je suis heureux de savoir qu’un mandat est parvenu, peut-être les autres suivront-ils bientôt.

J’espère qu’André va mieux. Il y a très longtemps que je n’ai pas eu de ses nouvelles. Dans quel secteur postal est-il ? Je n’avais pas compris ce que vous demandiez pour les photographies du groupe. C‘est Parmentier qui en est l’auteur. Si je lui en demandais une autre, il ne me la refuserait pas, mais je ne sais pas quand il la ferait, et il est probable qu’elle serait identique à la 1ère comme fixage.

Nous sommes revenus à notre position.

J’y remonte dès demain matin pour remplacer Lamarzelle qui est grippé. Mais j’espère que cette grippe ne sera pas grave.

J’ai pris un bain à S.. C’est le premier que je prends sur le front même. Nous avons remis une salle en état pour les officiers de S. Il y a eu ce matin une attaque allemande au pays de Ph. Moreau mais elle a été aussitôt enrayée, sans perte pour nous. Il s’agissait de troupes boches nouvellement arrivées et peu au courant de la guerre de tranchées. On les a entendu la nuit faire du bruit, puis on a entendu des commandements « Versammlung ! » [Rassemblement !] « Bereit » [Prêt]. On a immédiatement garni nos tranchées, prévenu l’artillerie. Les Boches sont sortis tranquillement de leurs tranchées à un commandement, puis à un signal tout est parti : fusils, mitrailleuses, canons. Ils n’ont pas été longs à faire ½ tour, tirant come ils pouvaient leurs blessés.

Les voilà probablement assagis pour quelques jours.

Je vous embrasse tous trois bien affectueusement,

M. Alliot

 

 

 

Correspondance n°20 [Suzanne (Somme)]

 

 

05 mars 1915

Ma chère maman

Je n’ai pu t’écrire hier, car j’ai été assez occupé toute la journée par des signalements d’avions, des tirs sur ballon ou ma présence à l’observatoire. Nous avons eu peu de répit cette semaine, à cause de Lamarzelle, mais il va mieux et est monté aux batteries aujourd’hui.

Nous avons eu hier une vraie journée de printemps, première journée d’un printemps qui j’espère sera mémorable dans l’histoire. Je pense qu’il décidera de la solution d’un des plus grands chocs de l’histoire et que cette solution nous sera favorable.

Ici, on pourrait assez dire que notre état d’esprit est le suivant : « Quand et comment viendra la fin ? On ne sait au juste et les causes seront probablement multiples, mais, il est une chose dont tous sont absolument persuadés : c’est le succès final.

Pour ma part, je crois que la guerre économique, celle qui se fait sans éclat, sans grandes pertes de vies et sans grande gloire, aura maintenant une part aussi grande que les opérations militaires.

L’absence de commerce, la paralysie des grandes industries et le blocus, sont autant de victoires.

D’autre part, j’ai beaucoup de foi dans les opérations menées aux Dardanelles, non pas seulement pour elles-mêmes et pour le bruit que ferait la prise de Constantinople, mais à cause de l’influence sur les nations balkaniques et méditerranéennes, et il est très certain que lorsque nos corps d’armée refouleront les coalisés, nos diplomates gagneront ou consolideront les victoires.

Chacun a sa petite part dans tout ceci, pour moi, cela a consisté hier à parcourir des boyaux et à faire l’observation, à genoux, dans de la glaise humide, ce qui a fait protester mon ordonnance, lorsque ce matin, il a pris la brosse pour nettoyer mes effets !

J’ai reçu hier ta lettre du 1er mars. Je suis heureux que tu me dises que S. a meilleure mine. Maintenant qu’Etienne est rentré, vous pourrez aller chez le photographe ; n’emmènerez-vous pas S.? Je lui est envoyé une petite photographie, à regarder rapidement, car elle est fort mal virée. Il y a quelques temps que je n’ai eu de nouvelles de Ph. Moreau. Tachez-donc d’en avoir chez lui.

Il y a aussi très longtemps que je n’en ai eu d’André : de Mazière, Bekeet, Bassée, avez-vous vu leurs parents (des 3 derniers).

J’espère que vous êtes toujours en bonne santé et vous embrasse fort affectueusement tous trois.

M. Alliot

 

 

 

Correspondance n°21 [Etinehem (Somme)]

 

 

10 mars 1915

Ma chère maman

Toujours la même chose, même vie. Ce matin, revue. Cet après-midi revue. Après le déjeuner, j’ai fait une promenade avec Stiassni et le vétérinaire, ce que nous avons vu de mieux c’est un hibou, c’est loin de la guerre. Avec plaisir aussi, nous tendons aussi nos fils russes vers l’Ouest, et l’on reparle d’Augustovo. J’ai su que le capitaine Garnuchot avait été blessé d’une balle à la tête. On lui a fait la trépanation, mais il va bien maintenant. Il a été décoré.

J’ai appris la mort d’un de mes camarades : Gréau, du 61e d’artillerie. Il avait été cité à l’ordre de l’Armée. Marquez-vous ces noms sur l’album de photographies de ma promotion ! Pensez aux photos que vous m’enverrez.

J’espère que Thérèse est remise. Je vous embrasse tous trois.

M. Alliot

 


 

Correspondance n°22 [Etinehem (Somme)]

 

13 mars 1915

Mon cher papa,

Je ne vous ai envoyé qu’un mot succinct, parce que je suis rentré tard d’une longue promenade à cheval (35 km) faite en compagnie de Stiassni. Nous sommes allés à une petite ville qui porte le même nom que mon oncle Dupuis [Albert (Somme)], et qui a été terriblement éprouvée. Nous y avons vu un de nos camarades : Nicaise, que j’ai connu à Charlemagne et à Centrale, puis je suis allé à l’ancien cantonnement de Philibert.

Malheureusement depuis sa lettre son cantonnement avait changé et il était trop tard pour que j’aille dans le pays qu’il habite momentanément.

Partis à h nous sommes rentrés à

Nous avons vu de tristes choses et de bien réconfortantes. D’abord j’ai vu ce que peut être le quartier d’une ville violemment bombardée sur un carré de 800m de côté, il ne reste pas une seule maison qui ne soit démolie, les unes ont reçu un obus, qui pénétrant par le toit a traversé tous les étages, entraînant plafonds et planchers, les autres ont été atteintes dans la façade, et celle-ci s’écroulant emmène le reste.

 Au point de vue bâtiments, ce que j’ai vu de plus curieux, c’est un toit qui avait glissé et qui se trouve à peu près intact mais aplati sur la chaussée. Dans les rues il y a de grands trous faits par des obus. Et cependant ces obus sont les mêmes que ceux que j’ai reçu au commencement de février mais quelle différence d’effets en campagne où dans une ville ! De l’église, il reste les murs et un clocher ajouré, surmonté d’une vierge présentant l’enfant Jésus, la statue s’est détachée par le socle, elle tient cependant ce qui donne un aspect peu rassurant. D’ailleurs à chaque maison, il y a des pans de murs et des cheminées qui font des prodiges d’équilibre pour tenir, si bien qu’on se retient d’éternuer. Et, au milieu de cela, on voit des lits, des matelas, des rideaux, des couvertures, des coffres-forts, des buffets, pêle-mêle, et dans quels états.

Je ne serai content que quand j’aurai vu des villes allemandes dans cet état. J’ai vu des ateliers écroulés, ruinés… bon exemple pour Essen !

La batterie où est Nicaise est en position depuis très longtemps, mais ils n’ont jamais exactement été repérés, malgré les avions, ce qui fait qu’ils vivent dans une assez grande tranquillité.

Ces troupes sont de l’active, bien encadrées, bien commandées, et là on s’est vraiment organisé pour l’hiver : écuries, mangeoires etc.

Chez nous chaque fois qu’on coupe un arbre, tout le monde « gueule », le génie, l’infanterie (qui cependant ne s’en prive pas), l’Etat-major ! J’ai vu des chevaux en bon état, par suite d’une bonne remonte, et surtout dans toutes ces troupes de l’active, j’ai vu des jeunes soldats propres, astiqués, respectueux, et qui ne causent aux officiers qu’en talons joints et les mains au côté. J’ai vu ainsi surtout de l’infanterie et de la cavalerie, et le parallèle que j’ai établi entre ces troupes et nos réservistes normands, électeurs, ivrognes et paresseux n’a pas été sans me faire un grand plaisir… mais si je parle plus haut de notre infanterie je dois excepter notre artillerie, et cela n’est pas de l’égoïsme ou de la facilité, mais nos hommes mieux encadrés à faire un service plus conforme à ce qu’on leur a appris au quartier ont plus de tenue et plus de discipline que les réservistes français.

Tu m’as envoyé un article intitulé « Les rois de la boue ». En effet, vers décembre, nos batteries tendaient vers cet état, mais depuis, on a repris une tenue plus régulière.

Nos séjours au repos en ont été la cause et les rassemblements que nous y faisions ne différaient que fort peu de ceux des manœuvres. On y voit des gens en tenue régulière, cravatés, cirés, coiffés droits, cheveux courts, boutons au complet, etc., ce qui est loin de certains désordres vus à côté de nous.

Nous avons avec nous quelques formations territoriales, du même recrutement d’ailleurs que nos réservistes. Ce sont des gens qui furent astreints au service de 3 ans… et il y a une rude différence à leur avantage entre eux et les réservistes. Et c’est maintenant qu’on mesure toute l’habileté de l’Allemagne lorsqu’elle paya des journaux, favorisa des campagnes, approuva des politiques imbéciles qui nous ont amené la loi de deux ans. C’était mon rêve, qu’on amena dans cette ville que je vis hier, pour y habiter 8 jours, tous les députés politicaillots du midi, et qu’on fit défiler tous ces grands théoriciens au milieu de ces ruines ! Serons-nous encore aussi crédules après la guerre ? Et j’espère que quand maintenant, on parlera à nos ouvriers du Nord de la France, de l’internationalisme, et de la fraternité de tous les prolétaires, ils sauront à quoi s’en tenir !

Mais, il me semble que je laisse bien courir ma plume. Je prends vos lettres pour y répondre. J’ai reçu hier celles du 9 et du 10 mars, ainsi que les deux articles de journaux « Le roi de la boue » et « l’Artilleur ».

Nous avons cru un moment, comme vous, qu’il y aurait une interruption dans le service postal. Ce n’est pas vrai. Notre dépôt n’est plus à Saint-Cloud mais à Caen.

J’approuve pleinement vos projets pour Saint-Maixent et cela fera certainement beaucoup de bien à Thérèse de passer 15 jours à la campagne.

La mort de la mère de Félicie a dû soulager cette dernière, car c’est bien triste de voir ses parents en cet état. Je crains bien, d’après ce que vous me dites, que Monsieur [Monier ?] ne voit pas la fin de la guerre ! J’ai vu pas mal de gens du régiment de Robert, mais sa batterie et lui sont loin d’ici.

Je ne peux pas vous envoyer les clichés des photos que vous avez vues, car ils ne sont pas à moi. Mais je vais demander à leurs possesseurs, de me faire deux positifs virés convenablement.

Je te remercie des bonnes nouvelles que tu me donnes de Suzanne. Elle a l’air d’avoir passé la période critique de cette espèce de crise due à l’énervement et à l’inquiétude. Dans ses lettres, elle me dit aussi aller mieux et l’on sent qu’elle se fatigue moins facilement.

Je souhaite que Flogny ne soit prisonnier, car entre tous les désagréments que cela aurait pour lui et toute sa famille, ce serait bien ennuyeux pour l’usine.

Je vous embrasse tous trois bien affectueusement.

M. Alliot

J’ajoute à cette lettre, mes amitiés pour toute la famille, car je suppose que ces nouvelles circuleront un peu.

 

 

 

Correspondance n°23 [Etinehem (Somme)]

 

 

22 mars 1915

Mes chers parents,

Peut-être ce bout de papier vous atteindra-t-il ?

Je crains que ma lettre du 20, ne vous ai touchés à temps !

Si vous êtes à l’hôtel de Belfort, il y a deux solutions- possibles.

Ou bien rester et attendre, pendant 8 jours, je ferai mon possible pour obtenir un peu de liberté à ce moment ?

Ou bien abandonner la partie !

Je n’ose insister pour la première solution à cause du long délai, cependant elle me ferait grand plaisir.

Evidemment la deuxième solution serait la plus raisonnable, mais c’est dur d’être toujours raisonnable !

Quoi qu’il en soit, répondez-moi aussi vite que possible.

Je vous embrasse tous bien affectueusement, combien 3 ou 4 ?

Que Suzanne console maman,

Que maman console Suzanne

Que Thérèse et papa consolent les deux autres, que les autres consolent Thérèse et papa.

M. Alliot

 

 

 

VIII / FRAGMENT NON DATE, NON SITUE

 

 

Correspondance n°24 [Fragment de carte-lettre]

 

 

M […]

Je n’ai plus de […]

je crains qu’il n[…]

les quelques moi[…]

temps à autre […]

Je vais bie[…]

chose. J’espè[…]

à Remilly […]

Je vous em[…]

ainsi que […]

 

 

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Les lettres du sous-lieutenant Maurice Alliot, 43e RA

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