Véhicules et armements motorisés 1915-1918
Différents matériels automobiles utilisés par diverses unités de l’armée française figurent au sein de l'album de René Verney. Les clichés sont très peu nombreux et répartis tant dans la partie introductive (p. 14-16) que dans les parties consacrées aux différentes prises de position (Front de l’Aisne p. 44 et Secteur de Champagne p. 195). Nous présentons ci-dessous l’ensemble de ces clichés en tentant de préciser au mieux le contexte dans lequel ils ont été réalisés, regroupés par types de véhicules.
Autobus de transport de personnel (Berry-au-Bac, Aisne, 1914-1915)
Un cliché (p. 44) présentant la carcasse d’un autobus ayant servi au transport de troupes figure dans la partie de l’album correspondant à la période au cours de la laquelle le 43e RAC est engagé sur le Front de l’Aisne durant l’hiver 1914-1915 (cf. Journal de marche II Front de l'Aisne). Cette prise de vue datée de mars 1915 peut être très précisément localisée grâce à sa légende, l’histoire du véhicule qui porte sur la plateforme arrière le numéro 35, étant par ailleurs bien documentée.
Il s’agit d’un autobus parisien appartenant à une section de transport de personnel (TP) tombé en panne sur la route nationale 44 reliant Reims à Laon (actuelle D1044) à quelques centaines de mètres au nord-ouest de Berry-au-Bac, lors de l’offensive de la Marne en septembre 1914. Le véhicule qui n’a pu être dégagé a donné son nom au secteur de tranchées françaises située sur cette partie du front dit « secteur de l’autobus » (cf. dictionnaire du chemin des dames).
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Berry-au-Bac (Aisne), route 44, mars 1915
autobus près des tranchées, [secteur de l'autobus] (Album p. 44)
Autobus de ravitaillement en viande fraiche
La partie introductive renferme deux clichés d'autobus parisiens utilisés par l’armée (p. 16). En effet, dès août 1914, est opérée la réquisition des véhicules de la Compagnie Générale des Omnibus (CGO) afin de subvenir au transport des troupes vers le front mais aussi du ravitaillement. Le premier cliché présente un train d’autobus dont la plateforme arrière porte le sigle RVF ce qui permet de confirmer leur appartenance à l’une des sections du ravitaillement en viande fraiche (RVF), unité du service automobile de l'armée dépendant du Train des équipages.
Le second cliché présente l’aménagement intérieur d’un de ces véhicules permettant l’accrochage des carcasses à des crocs de boucher. Une section de huit autobus (comme ici sur le cliché de gauche) est affectée à cet usage pour chaque division d’infanterie composée de 4 régiments, mais il n’est malheureusement pas possible de préciser à quelles unités ce train était affecté ni la période, ni le lieu de ces prises de vue.
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Autobus [convoi RVF] et intérieur d'autobus (Album p. 16)
Auto-projecteur (Artois avril 1915 ?)
La photographie d’un véhicule-projecteur (voiture groupe électrogène avec projecteur Renault) accompagne les clichés d'automitrailleuses dans la partie introductive (p. 15). Le marquage du véhicule n’est malheureusement pas visible, la légende n'apportant aucune précision sur le lieu et la date de la prise de vue. Il ne nous est donc pas possible d’identifier l'unité à laquelle appartient ce véhicule, peut-être une des sections de projecteurs automobiles du génie (SAP), unités rattachées aux divisions d’infanterie dès le printemps 1915.
Ainsi le groupe des parcs du 3e corps d'armée est-t-il, lors de son arrivée en Artois en avril 1915, placé sous les ordres de la 47e DI pour faire mouvement sur route. Parmi les unités accompagnant l'échelon de corps du PA3, on peut noter, au sein du convoi constituant le "groupe des parcs", la présence de la section de projecteur de la 47e DI auquel pourrait appartenir ce véhicule (JMO du Parc d'artillerie du 3e corps, voir au 10-17 avril 1915).
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Auto-projecteur (Album p. 15)
Camions de transport de troupes (Artois, mai-juin 1915 ?)
Un seul cliché (p. 16), malheureusement ni situé ni daté, présente un train de camions de transport de troupe (ici des fantassins) .
Tout au long des opérations au sein desquelles le 43e RAC est impliqué, les mouvements des hommes et du matériel s’effectuent, comme en témoignent les JMO, soit par voie ferrée, soit par route à l’aide des équipages hippomobiles du train régimentaire. Un certain nombre de clichés rendent compte de ces déplacements, notamment lors du mouvement entre les Fronts de l’Aisne et d’Artois à la fin du printemps 1915 (Album p. 57-61).
Dès cette période est parallèlement enregistré le premier transport par camion de l’infanterie de la 5e DI à laquelle est rattaché le 43e RAC (JMO 5e DI 23/05/1915). L’examen attentif de l’équipement individuel des hommes figurant sur le cliché (tenue bleu horizon, absence de casque et d’équipement individuel contre les gaz), comme les mouvements simultanés du 3e groupe du 43e RAC et des 9e et 10e brigades d’infanterie vers leurs cantonnements de Brévillers, Sus-Saint-Léger et Le Souich (Somme) nous incite à proposer une datation pouvant correspondre à ces déplacements opérés entre le 23 et le 25 mai 1915. Néanmoins au cours de cette même période qui se prolonge jusqu'au 3 juillet (voir Journal de marche III Artois), le 3e groupe du 43e RAC placé au repos, croise d'autres unités engagées en Artois (tel le 228e RI cf. JMO régimentaire et V. Le Calvez) auxquelles peuvent également être associées ce mouvement par camion.
Quant à René Verney, le seul transport par camion qui lui ait été donné de suivre avec son régiment, correspond au transfert du 24e RI en septembre 1918 depuis le secteur du Matz (Oise) vers Chézy-sur-Marne (Aisne) (cf. Journal de marche X Aronde et Matz).
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Cliché non légendé [Artois, fin mai-juin 1915 ?] (Album p. 16)
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Cliché non légendé [troupes du 228e RI (53e DI), Artois, fin juin - début juillet 1915 ?] (Album p. 70)
Automitrailleuses (Artois, été 1915)
Trois des clichés de l’album rassemblés dans la partie introductive (p. 14-15), présentent un groupe d’automitrailleuses au stationnement. Bien que les légendes ne précisent ni la date, ni le lieu des prises de vue, une rapide analyse permet d'affirmer qu'elles remontent à l’été 1915 et, compte-tenu du parcours du 43e RAC, sont donc vraisemblablement réalisées dans l’Artois (cf. Journal de Marche III Artois).
Les premiers groupes d’automitrailleuses et autocanons (GAMAC) sont en effet des groupes mixtes (GMAMAC) composés majoritairement de marins (on reconnait ici des fusiliers marins) auxquels s’adjoignent des effectifs de l’armée de terre. Un groupe est composé de dix véhicules blindés armés de canons de 37mm ou de mitrailleuses 8 mm servis par un équipage de cinq hommes (ici des automitrailleuses Renault modèle 1915) accompagnés de trois voitures de service dont deux fourgons à munitions.
Fin 1915, on dénombre vingt groupes mixtes servant les grandes unités au front. A partir du printemps 1916, les marins quittent les équipages d’automitrailleuses et sont définitivement remplacés par des éléments de l’armée de terre.
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Auto-mitrailleuse [Artois, été 1915] (Album p. 14)
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Autos-mitrailleuses [Artois, été 1915] (Album p. 15)
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Autos-mitrailleuses [Artois, été 1915] (Album p. 15)
Chars Schneider et Saint-Chamond (Camp de Mailly, février 1918)
A l’occasion de la montée du 43e RAC en Champagne les cadres du régiment participent du 29 janvier au 15 février 1918 à des manœuvres divisionnaires organisées au camp de Mailly. Les JMO régimentaires nous apprennent que sont alors notamment réalisés des exercices de pointage sur tanks, quatre clichés (cf. Journal de marche IX Champagne 43e RAC) nous permettant de préciser qu’il s’agit de chars Schneider CA1 et Saint-Chamond M1, blindés français engagés sur le terrain respectivement dès avril et mai 1917.
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Tank Schneider, Camp de Mailly, février 1918 (Album p. 195)
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Tank Saint-Chamond, Camp de Mailly, février 1918 (Album p. 195)
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Tank Saint-Chamond, Camp de Mailly, février 1918 (Album p. 195)
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Tank Saint-Chamond, Camp de Mailly, février 1918 (Album p. 195)
Pour aller plus loin :
-A. POLI "Les Groupes mixtes d'Automitrailleuses et d'Autocanons de la Marine pendant la Guerre de 1914", in Revue Historique des Armées, n° 3, 1988, pp. 91-100.
-Jean-Michel BONIFACE et Jean-Gabriel JEUDY Les camions de la Victoire 1914-1918. Paris, Editions Massin, 1996.
-Joseph Aimé Edouard DOUMENC Les transports automobiles sur le front français, 1914-1918. Paris, Plon-Nourrit et Cie, 1920
-Pour l'identification des véhicules blindés, voir site : Chars français.net.
-SAUVEROCHE "Où sont les autobus ? Leur militarisation pour le ravitaillement des troupes en viande fraiche." L’Illustration, Samedi le 22 Aout 1914, 72e Année, No. 3730
-Voir également en pdf téléchargeable : Michel GUIRONNET Les autobus de la Marne La Charte, juillet-août 2010.