Maurice Alliot sous-lieutenant au 43e RA, correspondance 1914-1915
LES LETTRES DU SOUS-LIEUTENANT MAURICE ALLIOT
43e régiment d’artillerie, 21e batterie
30 juillet 1914 – 22 mars 1915
(conservées aux archives départementales du Calvados cote 1J/42/9)
INTRODUCTION
Les Archives départementales du Calvados conservent un ensemble de courriers émanant de Maurice Louis Ernest Alliot (Saint-Denis 1889 - Fontenay-lès-Briis 1990), jeune centralien engagé dans la Grande Guerre au sein du 43e régiment d’artillerie. Ce fonds (Cote 1J/42/9) entré dans les collections en 1998 est ainsi présenté sur le portail des Archives du Calvados en ligne : Première Guerre mondiale : petits fonds et pièces isolées / Maurice Alliot, centralien, sous-lieutenant au 43e régiment d’artillerie basé à Caen / Lettres de Maurice Alliot à ses parents, domiciliés à Paris, 38, rue de Reuilly. Date : entre le 30 juillet 1914 et le 22 mars 1915.
Nous présentons ici ce fonds dont nous avons engagé la retranscription dans le cadre du travail de collation des sources documentaires relatives au 43e régiment d’artillerie que nous mettons progressivement à disposition sur ce site.
Le lot de correspondances est constitué de 23 lettres précisément datées, accompagnées d’un fragment et de deux enveloppes à en-têtes de la « manufacture de fils et câbles pour l’électricité R. Alliot & Rol, ayant servi au classement des courriers datés de février et mars 1915.
La plupart des échanges sont rédigés à l’encre sur papier libre, allant d’un à six feuillets et sont privés de leur enveloppe. Quatre seulement sont rédigés sur une carte de correspondance portant au recto l’adresse postale du destinataire. Une seule carte en date du 21-22/09/1914 est privée de toute oblitération. Les trois autres ont reçu le cachet à date du service du « Trésor et Postes » (voir : Lettres et correspondances des poilus du 43e RAC). La première porte le cachet du « bureau payeur 192 » daté du 08/09/1914, parallèlement associé au cachet régimentaire « 43e régiment d’artillerie, 53e division d’infanterie 1er groupe ». Les deux autres, oblitérées les 11/02 et 11/03/1915, portent le cachet du « secteur postal 41 » dont relève alors l’unité, une seule comporte l’adresse de l’expéditeur « s/Lt Alliot 21eme Bie – 43eme Artie – S.P.41 » (rédaction du 10/03 et oblitération du 11/03/1915).
Cachets au recto de la carte rédigée le 08/09/1914
Cachet du Secteur postal n°41 Cachet du secteur postal n°41
daté du 11/02/1915, apposé sur la carte daté du 11/05/1915 apposé sur la carte
rédigée le 10/02/1915 rédigée le 10/03/1915
Adresse portée au dos de la carte rédigée le 10/03/1915
(Fonds Maurice Alliot Archives départementales du Calvados, 1J/42/9)
Si ces correspondances forment un lot homogène car relevant d’échanges suivis avec les mêmes destinataires, il est à l’évidence incomplet. On doit ainsi remarquer qu’une partie des documents a été déchirée puis reconstituée avec du ruban adhésif, l’un d’entre eux resté incomplet et l’existence d’un second fragment inexploitable démontrant à eux seuls l’état lacunaire du lot, sans qu’il soit possible de mesurer l’importance des pertes. Par ailleurs rien ne permet d’expliquer l’interruption brutale de la correspondance à partir du 22 février 1915.
La répartition des 23 courriers permet de remarquer l’irrégularité des envois, que l’on peut regrouper en deux ensembles. Le premier rassemblant 10 lettres, est daté des deux premiers mois du conflit, allant de la mobilisation jusqu’à la stabilisation du front dans le secteur de Berry-au-Bac (Ainse). Il est suivi d’une interruption de près de deux mois, comprise entre le 22 septembre et le 10 novembre 1914, correspondant à une période d’évacuation du front et de convalescence. Le second ensemble est formé de 13 courriers répartis sur quatre mois (novembre 1914 - mars 1915) au cours desquels leur auteur est, avec son unité, en positon dans la Somme dans le secteur de Maricourt et Suzanne.
(doc. verney-grandeguerre)
Malgré les incertitudes relatives à son état lacunaire, ce lot a le grand intérêt de couvrir l’ensemble des phases et opérations militaires auxquelles participe le combattant durant les 8 premiers mois du conflit. Il permet d’approcher l’état d’esprit d’un jeune ingénieur de 25 ans, se confrontant à la réalité d’une guerre à laquelle il est activement préparé depuis son arrivée sous les drapeaux deux ans auparavant, période au cours de laquelle il accède au grade d’officier de réserve (voir infra les précisions apportées sur son parcours militaire).
Nous pouvons remarquer que la teneur des courriers évolue en fonction de ces deux périodes séparées par sa convalescence, ce qui s'accorde parallèlement avec l'évolution même du conflit.
Au cours de la première, d'août à septembre 1914, les lettres sont de brefs messages, avec un propos se voulant en premier lieu rassurant sur son état de santé et ses conditions de vie. Ils sont parallèlement dominés par l'expression du besoin d'intenses échanges épistolaires avec ses proches, aspirations alors contrariées par les retards imposés par l'organisation postale (voir : Lettres et correspondances des poilus du 43e RAC).
La crainte de la censure, exprimée à plusieurs reprises, mesure à l’évidence ses propos et explique le silence total sur sa position géographique que seules des sources connexes permettent de révéler. Celui-ci n'est rompu que le 13 septembre alors même que s'achève la Bataille de la Marne et que son unité va se confronter à la stabilisation du front près de Reims. C'est alors de manière rétrospective, qu'il rend compte du long périple de plus de 450 km parcouru depuis le débarquement de sa batterie à Marle (Aisne) le 11 août. Le mouvement harassant opéré durant ces 33 jours, ne lui ont laissé que peu de moments de repos se déroulant souvent dans des conditions précaires, ce qui contribue peut-être à expliquer la brièveté des messages envoyés.
S'il n'est directement engagé dans les combats qu'à partir des 28-29 août (Bataille de Guise), ses appréciations sur la stratégie du commandement se limitent à une simple interrogation sur les conditions de mise en oeuvre de la retraite, engagée depuis les rives de la Sambre dans la région de Maubeuge (Nord) jusqu'à celles de la Seine dans la région de Provins (Seine-et-Marne). Il s'agit d'un rare élément révélant ses inquiétudes, alors que les unités sont placées sous une très forte pression ennemie. Une préoccupation qui s'étend fin août par une simple allusion, aux territoires laissés aux mains des allemands, exprimée lors du passage non loin de Bohain-en-Vermandois (Aisne), berceau familial où est implantée l'une des deux usines de la société fondée par son père. Il faut ainsi souligner les termes de sa rancœur vis-à-vis des autorités allemandes, la violence de l'agression étant jugée indigne d'une nation civilisée. Celle-ci est alors caractérisée par les agissements des "hulans", le qualificatif de "Boche" n'étant pas encore utilisé.
Au cours de la seconde période, qui correspond à son stationnement à la tête de sa batterie dans la Somme de novembre 1914 à mars 1915, ses courriers sont nettement plus développés. Les batteries se relaient alors sur les positions offrant un rythme de repos régulier aux canonniers et à leurs officiers à Suzanne puis Etinehem. C'est dans ces périodes qu'il rédige à l'évidence ses lettres, qui fourmillent d'anecdotes sur ses conditions de vie et activités quotidiennes au cantonnement.
La stricte observance des consignes de silence sur le déroulement des opérations militaires est désormais plus relâchée, mais leur relation reste un élément très secondaire avec un décalage dans les comptes-rendus, notamment concernant les pertes subies au feu.
Le propos met toujours en valeur la profondeur de ses sentiments pour ceux restés à l'arrière, la stabilisation du front et l'amélioration du système postal favorisant l'élargissement de son cercle de correspondants. On assiste alors à la multiplication des marques d'affection caractérisées par la réception de colis de nourriture ou d'effets personnels, et en retour l'envoi de photographies ou d'objets souvenirs du front. S'il ne bénéficie pas encore de permission, les courriers nous informent que ses parents et sa fiancée parviennent à se rendre jusqu'à Amiens située à 40 km à l'arrière du front où ils se rencontrent en février puis en mars.
Nous devons à l'opposé noter une véritable retenue vis-à-vis de l'expression de l’esprit de camaraderie qu'entretiennent ordinairement les officiers d’une même unité, comme sur la relation privilégiée pouvant exister entre les officiers et leurs subordonnés directs. On peut néanmoins noter des tentatives de rapprochement avec des membres d'autres unités agissant dans le secteur de la 53e DI et plus particulièrement en décembre 1914 et janvier 1915, avec le 45e régiment d’infanterie qui, formé à Laon, intègre des connaissances tant personnelles que familiales.
Parmi les observations éclairant son état d'esprit général doit-on noter la critique qu'il porte vis-à-vis du comportement et de la tenue des régiments d'infanterie de sa division. Celle-ci se teinte d’un esprit de classe s'associant à une analyse politique à l’emporte-pièce à peine esquissée rejetant ironiquement l'intertionnalisme ouvrier. Il est également intéressant de noter que, particulièrement impressionné par les dommages subis par les infrastructures civiles, ceux-ci paraissent le marquer tout autant, si ce n'est plus, que les combats auxquels il participe.
Particulièrement sensible aux informations qui lui parviennent au travers de la presse sur la situation internationale, il place une part de ses espoirs dans le jeu des alliances diplomatiques et les succès remportés par les alliés. N'exprimant aucun doute quant à l'issue du conflit, il est par ailleurs convaincu que « la guerre économique » aura désormais « une part aussi grande que les opérations militaires » (lettre du 05/03/1915). C'est ici le centralien destiné à une carrière d'industriel qui s'exprime, certes officier d'artillerie, mais qui aborde ses fonctions comme une nécessité temporaire imposée par les circonstances. Sans que puissent être remises en cause tant la valeur de son engagement que de son patriotisme, la nature de cette appréciation permet d’éclairer non seulement le positionnement qu’il prend vis-à-vis des évènements, mais surtout l'esprit général de cette correspondance au ton très mesuré.
Pour une meilleure compréhension de la teneurs de ces courriers, il est indispensable de les mettre en contexte. Ecrits émanant d'un combattant, il est en premier lieu nécessaire de cerner le parcours militaire de ce dernier. La nature intime de la correspondance nécessite parallèlement une approche permettant de mettre en lumière combien sa position sociale éclaire son état d'esprit. C'est à cette double caractérisation de la personnalité de Maurice Alliot que les lignes suivantes sont consacrées.
Pour cerner le parcours militaire du rédacteur, sous-lieutenant à la 21e batterie du 43e régiment d’artillerie, nous bénéficions en premier lieu des informations émanant de sa fiche de matricule : Registre de matricule, 4e bureau de la Seine, classe 1909, matricule n°4704. Celles-ci, ci-dessous retranscrites sont enrichies de plusieurs compléments précisant son parcours militaire durant le conflit.
ALLIOT, Maurice Louis Ernest
Né le 26 mars 1889 à Saint-Denis département de la Seine
Fils de René Charles Henri et de Verstraet Marie
Etudiant, à l’Ecole Centrale des Arts et Manufactures à l’incorporation.
Domicilié 38, rue de Reuilly, Paris XIIe (domicile de ses parents).
Engagé pour cinq ans le 17/06/1910 à compter du 01/10/1909 au titre de l’Ecole centrale des arts et manufactures pour le 29e régiment d’artillerie. Placé dans la disponibilité en exécution de l’article 1er § 4 de l’Instruction du 7 avril 1906.
Incorporé à compter du 10/10/1912. Arrivé au corps et 2e canonnier conducteur ledit jour. Brigadier le 14/02/1913. Maréchal des logis le 24/07/1913. Promu sous-lieutenant de réserve le 01/10/1913 et affecté au 43e régiment d’artillerie.
[Il est affecté au sein de l’une des huit batteries constituant le du 43e R.A.C., dont le dépôt se situe à Caen (voir : Le 43e RAC : de Rouen à Caen 1911-1940). Lors de la mobilisation, il passe à la 21e batterie, alors en formation à Versailles. Celle-ci appartient au groupe de renforcement régimentaire qui entre en campagne le 11 août 1914 en accompagnant le mouvement de la 53e Division d’infanterie de réserve ou 53e DR (élément du 4e groupe de divisions de réserves ou GDR4, affecté à la 5e armée le 15/08/1914). Le groupement d'artillerie de la 53e DR (ou AD53) suit donc un parcours bien distinct de celui du 43e RAC, artillerie divisionnaire de la 5e Division d’infanterie (voir : Le 43e régiment d’artillerie 1914-1918)].
Citation à l’ordre de la 53e DI le 22/10/1914 « Blessé le 20 septembre et resté à son poste refusant d’être pansé avant ses hommes. » [Maurice Alliot est blessé alors qu’il est en position de tir à Cormicy (Marne) à la Grande Montagne le 20/09/1914. Il est évacué du front et ne rejoint sa batterie que le 10/11/1914].
Promu lieutenant de réserve à titre définitif par décret présidentiel en date du 30/03/1915 pour prendre rang le 07/03/1915.
Blessé le 05/07/1916 en secteur de Guillaucourt (Somme). Cité à l’ordre de l’armée « Officier d’une énergie et d’une bravoure remarquables, a commandé sa batterie de la manière la plus brillante pendant la période du 23/02 au 06/07/1916. Blessé grièvement le 06/07/1916 en exécutant une reconnaissance en 1ère ligne ; a achevé cette reconnaissance, a consenti à se laisser évacuer lors de sa mission terminée. » Chevalier de la légion d’honneur (décret du 13/08/1916, J.O. du 29/08/1916).
[D’après le JMO régimentaire, commandant la 21e batterie, il est blessé le 06/07/1916 : « 11h30 Reconnaissance exécutée par le capitaine Argelliès et les 3 commandants de batterie pour une position de batterie dans le ravinot sud-est du cimetière de Fay. Entre le cimetière et la corne N.E. du bois du Satyre… 14h Au cours de la reconnaissance – Lieutenant Baude 22e batterie blessé au pied droit – Lieutenant Contant 8e Hussards écorchures aux mains et au nez – Lieutenant Alliot 21e batterie blessé au pied par éclat d’obus. » et évacué le lendemain 07/07/1916 à 16h. Le capitaine Girard note quant à lui dans son journal à la date du 06/07/1916 : « Les lieutenants Alliot et Baude ont reçu chacun un éclat d’obus dans le pied ; si pour l’un la chaussure seule a été traversée, pour Alliot c’est plus grave : il sera évacué. » [Girard] Sur le front occidental avec la 53e division d'infanterie, II, Besançon, Sequana s.d, p. 240.
A la date du 25/01/1917 le JMO régimentaire du 243e RAC ne signale pas la présence de Maurice Alliot parmi les officiers attachés au régiment nouvellement créé en y intégrant le 1er groupe de renforcement du 43e RA. Le capitaine Cardon l’a remplacé au commandement de la 21e batterie. Maurice Alliot à l’issue de sa convalescence, semble en effet, être affecté toujours sous l’uniforme du 43e RA, au Service de renseignements aéronautiques du 5e Corps d’armée cf. citation ci-dessous :
Citation G.Q.G …ordre 441 du … « A la tête du S.R.A.5 un C.A depuis plus de 18 mois, y a fait preuve en toutes circonstances d’une grande acuité et une rare compétence au cours des observations de mars à août 1918. A réussi malgré les variations du front à tenir toujours le commandement au courant de la situation de l’artillerie adverse et a fourni les renseignements précis permettant un travail efficace de la contre-batterie. »]
Promu capitaine à titre définitif par décret du 02/08/1918, J.O. du 05 et 09/08/1918 [maintenu au 43e RA cf. J.O.].
Affecté pour la démobilisation au 19e RAC le 11/06/1920, le 30/12/1920 affectation ratifiée par J.O. du 13/05/1921. Affecté au 32e régiment d’artillerie le 22/02/1924 par décision ministérielle du 22/02/1924 (J.O. du 28/02/1924). A effectué une période d’instruction au centre de mobilisation d’artillerie n°21 du 14/05 au 07/06/1929. Nommé chef d’escadron par décret du 18/12/1935 (J.O. du 25/12/1935), rang du 25.
Croix de guerre étoile d’argent et étoile de vermeil, chevalier de la légion d’honneur.
Comme nous l’avons vu plus haut, le groupe de renforcement du 43e régiment d’artillerie, constitue dès le début du conflit le 1er groupe de l’artillerie divisionnaire de la 53e division d’infanterie de réserve ou AD53. Ce groupement intégrant un groupe du 43e RA, un groupe du 11e RA et un groupe du 22e RA est appelé à former le 243e RAC lors de sa création le 01/04/1917. C’est ainsi l’historique régimentaire de cette unité qui en retrace le parcours durant toute la durée du conflit (Voir : Historique régimentaire du 243e régiment d’artillerie de campagne pendant la guerre 1914-1918. Nancy-Paris-Srasbourg, Berger-Levrault impr., s.d.). Mais ce fascicule de 40 pages n’offre malheureusement qu’un bref aperçu, condensé en deux demi-pages, des mouvements et actions de l’AD53 au cours de la période couverte par la correspondance.
Historique régimentaire du 243e RAC (coll. verney-grandeguerre)
A l’opposé nous disposons d’un autre récit, celui-ci particulièrement riche et détaillé, auquel nous pouvons nous référer. Il s’agit du premier volume de 218 pages de l’ouvrage en quatre tomes publié anonymement par Louis Clément Joseph Girard (Lons-le-Saulnier 1869 - Arbois 1934), capitaine commandant la 23e batterie du 43e RA, sous le titre : Sur le front occidental avec la 53e Division d’infanterie. I Août 1914 à Mai 1915. La guerre de mouvement. En secteur à Suzanne. Paris, Berger-Levrault éd. 1932.
Sur le front occidental avec la 53e Division d’infanterie. Tome I (coll. verney-grandeguerre)
Ce dernier qui est rédigé à la manière d’un journal intime, est un exceptionnel témoignage dans lequel le lieutenant Alliot est brièvement cité à plusieurs reprises (cf p.122, p.145, 151, 161). Il est par ailleurs enrichi de deux cartes hors-texte restituant le parcours des unités composant le 1er groupe de renforcement du 43e RA. La première s’associe à la première phase de la guerre durant laquelle, après une position de réserve à Laigny (11/08-20/08/1914), l’unité part à la rencontre de l’ennemi (21/08 -24/08/1914), suivie de la retraite (25/0805/09/1914) et enfin de la reprise de l’offensive durant la Bataille de la Marne (06-13/09/1914) et ce jusqu’à sa prise de position sur l’Aisne à Berry-au-Bac (Aisne) qui marque la période de stabilisation du front (14/09-01/10/1914). Une seconde carte situe précisément les positions prises par l’AD53 dans le secteur de Maricourt et Suzanne (Somme) du 15/10/1914 au 27/04/1915.
La répartition des courriers de Maurice Alliot, invite à reprendre ce découpage chronologique. Il est également indispensable d'y adjoindre une cartographie permettant de situer précisément le lieu de leur rédaction A chaque étape, il est également utile de proposer un renvoi aux pages du journal du capitaine Girard et ce, en dehors de la période au cours de laquelle ce dernier, blessé, est éloigné du front (15/09 - 08/12/1914).
Enfin, nous nous sommes appuyé pour synthétiser le parcours du combattant introduisant la retranscription des courriers, sur le Journal des Marches et Opérations (JMO) de l'artillerie de la 53e Division d'infanterie (documents inédits mis en ligne sur le site Mémoire des hommes - Portail culturel du ministère des Armées, 26 N 366/7 02/08/1914 - 31/03/1915 et 26 N 366/8 du 01/04 au 31/12/1915). Parallèlement, à la date précise de chaque courrier retranscrit est proposé un lien vers les pages correspondantes du JMO du 1er groupe de renforcement du 43e RA (même source 26 N 980/12 10/08 - 17/12/1914 et 26 N 980/13 17/12/1914 - 10/05/1915).
La lecture des correspondances si elle ne peut se départir d’une approche des activités militaires, révèle une part d’intimité qu’il est également nécessaire de contextualiser. Celle-ci s’associe naturellement à la relation qu’il entretient avec les membres du cadre familial et à une parentèle, elle-même touchée par la guerre car ayant de fortes attaches avec les territoires sous le feu des combats.
Ces courriers révèlent ainsi combien les relations épistolaires que Maurice Alliot entretient parallèlement avec sa fiancée Suzanne, mais aussi avec d’autres membres de la famille qui lui adressent parallèlement des colis, permettent d’entretenir des liens sociaux échappant au strict cadre régimentaire. Indépendamment de ses activités militaires et de la valeur de son engagement patriotique, ce dernier aspect est capital pour appréhender l’état d’esprit du combattant.
Les lettres de Maurice Alliot sont adressées à son père René Charles Henri Alliot (Bohain-en-Vermandois 1858 - Neuvy-sur-Loire 1951), à sa mère Marie Verstraet (1857-1940), fille de Louis Désiré Joseph Verstraet (Houplies 1833 - 1910), ingénieur civil administrateur délégué de la Société du canal des deux mers qui met fin à ses jours le 27 juillet 1910, et enfin à sa sœur, Thérèse Heloïse Sophie Alliot alors âgée de 25 ans et résidant à Paris avec ses parents.
Le 20 août 1915 il se marie à Paris, à Suzanne Marie Jeanne de Limasset (Châlons-en-Champagne 1893 - Caen 1975) (Suzanne dans les courriers), sœur de Pierre André Limasset (Reims 1881 - Paris 1931), lieutenant de réserve au 29e RA et gendre de Jacques Eliacin Rol (Montignac 1924 - Laon 1934), l’oncle paternel par alliance de Maurice Alliot. Un cercle familial qui détermine le cadre des activités professionnelles de Maurice Alliot au sortir du conflit et qui nous éclaire sur les en-têtes des enveloppes associées au lot de courriers conservés aux archives départementales du Calvados.
Enveloppe à l'en-tête R. ALLIOT & ROL
(Fonds Maurice Alliot Archives départementales du Calvados, 1J/42/9)
Son père, centralien, a fondé en 1899 en association avec son beau-frère Jacques Eliacin Rol, une société pour l’exploitation des manufactures de fils et câbles pour l’électricité installées à Bohain-en-Vermandois (Aisne) et Paris, 38 rue de Reuilly, qui est aussi l'adresse familiale.
Paris, personnel des câbles électriques Alliot, vers 1905
A l’issue du conflit, Maurice Alliot y prend une part active au côté de son beau-frère, Pierre André Limasset lui-même centralien. La société R. Alliot, Rol et Cie prend ainsi en 1927, le nom d’Alliot-Limasset et Cie. Au décès d’André Limasset, celle-ci est transformée en société anonyme sous la raison sociale Société des établissements Alliot, Limasset et compagnie, puis en 1947 en société à responsabilité limitée dont les actionnaires sont tous issus du cercle familial.
Les Grandes industries modernes et les centraux
Extraits de l'article : Anciens établissements R. Alliot Rol et Cie, Alliot Limasset et Cie 38, rue de Reuilly, Paris. Fils et cables pour l’électricité. Usines à Paris et à Bohain (Aisne).
In. : Les Grandes industries modernes et les centraux. Ouvrage édité à l’occasion du centenaire de l’Ecole centrale des arts et manufactures. Editions artistiques de Paris M. de Brunoff, s.d., [1929], p. 118.
Les courriers contiennent un très grand nombre d’occurrences nominatives ou termes associés à la désignation d’une personne. Nous avons entrepris leur relevé systématique afin de constituer un index enrichi de notes, permettant de préciser la nature des liens unissant les personnes citées à Maurice Alliot.
Nous y trouvons naturellement les membres du cercle familial associés aux patronymes Limasset, Rol, Verstraet et Mengus parfois seulement désignés par un prénom : Thérèse, Suzanne, André, Jeanne, Félix ou simplement par des termes de relation familiale : mon oncle, ma tante, bonne maman. Soulignons qu’à de très rares exceptions près, l’ensemble de ces personnes ont pu être précisément identifiées.
Nous rencontrons également un grand nombre de membres du corps militaire, parmi lesquels certains officiers de son régiment ou appartenant à des unités agissant dans le même cadre d‘opération.
Ce répertoire s’associe enfin à un réseau d’amitié élargi à d’anciens camarades de l’Ecole centrale notamment engagés dans divers régiments d’artillerie, comme aux connaissances évoluant dans un cadre social qui reste malheureusement difficile d'appréhender dans le détail. En effet c’est ici seulement qu’il devient impossible d’identifier précisément les individus désignés par un simple patronyme. Cet index auquel nous renvoyons parallèlement aux documents liés aux activités militaires, constitue malgré ce dernier écueil, un outil essentiel pour la mise en contexte des courriers.
Voir ci-dessous l'accès à :
La retranscription des lettres du sous-lieutenant Maurice Alliot, 43e RA
et à
L'index des noms ou termes associés à la désignation d'une personne
contenus dans les lettres du sous-lieutenant Maurice Alliot, 43e RA